Ils étaient finalement sortis et désormais ils se retrouvaient au milieu d’une foule de badauds empressés par l'agitation ambiante. Tandis qu’Allan regardait tout autour de lui à la recherche de quelque chose de précis, Misha flânait, le regard rêveur. Eh bien qu’il paraissait à première vue à l’aise dans ce monde qui n’était pas le sien, au fond de lui bouillait l’incompréhension à la vue des voitures, des écrans géants appliqués directement sur les façades des immeubles, des
cellphones minuscules dans lesquels ces gens étranges parlaient avec une attention incroyable. Qu’est-ce que c’était que ce foutu bordel ? se demandait-il à lui-même avec, pourtant, un sourire assuré aux lèvres.
La nervosité générale parvint vite jusqu’à lui, et comme une maladie, les premiers symptômes apparurent et il se mit à jeter des coups d’œil en tout sens, croyant qu’on avait percé son secret, découvert son identité. Il n’était pas fait pour être ici, il était telle une tâche de sang sur l’immaculée robe d’une religieuse. Non, il ne devait pas se laisser aller à la paranoïa maintenant qu’ils étaient près du but ! Et surtout, il ne voulait pas avoir l’air soucieux devant son acolyte et perdre ainsi toute l’estime qu’il s’était faite de lui (il l'espérait). Alors Misha s’adossa une nouvelle fois à son mur et attendit un instant que ça passe, comme un mauvais os de poulet qui n’arrivait pas à descendre dans l’œsophage. Son calme apparent revenu, il se concentra sur Allan :
− T’as pas répondu à ma question. On fait quoi maintenant ?
− Un instant, je réfléchis.
− Ouais, j’ai remarqué…
En un bond, Misha se retrouva à côté de son compagnon qui sursauta. Les mains dans les poches et se balançant d’avant en arrière comme un gamin impatient, il sifflotait.
− Ça suffit, lui intima sèchement Allan. Tu veux nous faire remarquer ou quoi ?
− Euuuh, bah non, quelle question ! répondit le blond avec un air indigné.
Allan soupira puis posa ses mains sur ses hanches.
− Bon, on va aller dans un coin qu’on m’a indiqué, et, le temps que ça se tasse et qu’on trouve un plan, on partira à la recherche d’une de mes connaissances.
− Ça a l’air sympa ! Eh mais, ça te dit pas d’aller voir avant ce qui se passe là-bas ? dit Misha en pointant le quartier bouclé du doigt.
− On n’a pas le temps.
− Allez ! Juste une seconde !! se plaignit l’ex-pirate avec une voix haut perchée.
− J’ai dit non ! s’exclama Allan, perdant toute patience. Tais-toi, et suis-moi.
Et pour éviter de subir encore les assauts infantiles de son compagnon, il s’enfonça dans la foule. Misha finit par le suivre, mais il grommelait dans sa barbe et regardait chaque personne qu’il croisait en chien de faïence.
Bientôt, ils arrivèrent dans un autre quartier, encore plus animé, mais d’une animation joyeuse, des éclats de rires et des conversations époumonées surgissant de tous les coins. Des filles et des garçons se pavanaient avec des crêtes sur la tête de toutes les couleurs. Misha fut un moment attiré par le joli minois d’une fille aux cheveux roses qui lui fit un charmant sourire, mais Allan le prit par le bras et accéléra le pas. D’autres arboraient des piercings accrochés à des endroits improbables comme la langue ou tout le long du cou ; d’autres encore étaient accoutrés avec des chaînes et des piques en argent… Bref, c’était un monde de dingues, un monde d’extravertis qui n’avaient pas peur de montrer leur différence de goûts… Et Misha adorait ça !