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 [rétro - 45 ans] Minoris

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Yhuk'ta Shwarin

Yhuk'ta Shwarin


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MessageSujet: [rétro - 45 ans] Minoris   [rétro - 45 ans] Minoris EmptyVen 20 Aoû - 19:02

[petite rétro que je voulais faire depuis longtemps, et pour laquelle je trouve enfin mon inspiration après 4 jours de rando à cheval \o/]


Yhuk attacha la bride de son cheval à un pommier sauvage, et le laissa brouter tandis qu'il entreprenait de cueillir les fruits de l'arbre pour se sustenter lui-même. Quelques mètres plus loin, un petit ruisseau lui fournirait se quoi remplir son outre d'eau.
La source descendait d'une falaise aux teintes ocres dont il ne distinguait même pas le sommet, et filait vers le fond de la vallée étroite le long de laquelle il cheminait depuis l'aube. Le soleil était haut dans le ciel à présent.
Il y avait peut-être quatre ou cinq heures qu'il était parti de son précédent campement. Lui et Siyah, sa jument, avaient parcouru une vingtaine de kilomètres à travers diverses petites vallées et plateaux : la monture escaladait les pentes en trottant, marchait d'un pas prudent dans les descentes...et partait d'un galop irrépressible dès qu'une étendue suffisante se présentait sous ses sabots, pour le plus grand plaisir du cavalier qui, sans avoir jamais vu de western, se complaisait tout à fait dans le rôle de l'indien qui crie "yiiiiha" les cheveux au vent.
Mais à présent ils étaient tous deux fatigués. Le soleil tapait fort, les ventres étaient creux et les bouches étaient sèches. La poussière collait au poil et aux vêtements... Il était temps de s'arrêter.
Yhuk se laissa tomber dans l'herbe en croquant dans une pomme.
Il était content d'être parti.

Trois jours auparavant il avait pris la fuite, lassé de servir d'esclave, depuis des mois, à une bourgeoise picomi dont les caprices étaient chaque jour plus absurdes. Il n'avait pas quitté l'étroitesse d'Aïn'rê pour se retrouver enfermé dans un palais, engoncé dans un costume de pingouin, forcé de jouer les clowns pour une vieille fille à moitié folle.
Alors il s'était soigneusement choisi un cheval à l'écurie. Il avait attendu le moment propice... Puis il était parti. Au grand galop. Et la jument avait bondi par-dessus la barrière de l'enclos sans hésiter une seconde, comme si elle aussi était heureuse de quitter sa prison pour explorer l'étendue du monde.

Partir. Toujours partir
Fuir Aïn'rê pour monter dans un navire en partance pour le bout du monde. Mais il s'était fait capturer par des pirates. Fuir les pirates pour rejoindre une île. Mais il avait atterri entre les mains de trafiquants d'esclaves. Fuir les trafiquants en se laissant vendre. Mais il s'était retrouvé dans une prison de verre.
« Fuir...Mais... » Voilà qui résumait bien l'année et demie qui s'était écoulée depuis qu'il avait quitté l'île. Il partait, mais il y avait toujours un mais. Du moins...jusqu'à présent : cette fois-ci, sa fuite semblait ne le mener que vers sa liberté, et il priait les esprits de le laisser galoper encore, le plus longtemps possible, dans les vallées vertes du Sud de Minoris.
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Yhuk'ta Shwarin

Yhuk'ta Shwarin


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MessageSujet: Re: [rétro - 45 ans] Minoris   [rétro - 45 ans] Minoris EmptyMer 25 Mai - 16:22

Quelques semaines plus tard...

Les rues de cette ville sont étouffantes, étouffées dans un entrelas de murs et de ruelles où se pressent des milliers de visages. Il fait chaud et humide. On dirait que le delta tout entier s'évapore, que la ville transpire. Le soleil brûle, il fait bouillir les corps et les inonde d'une chaleur poussiéreuse. Les bouches ne respirent plus qu'un air épais, lourdement tiède. On marche dans les ombres qui échappent à la lumière. On a les paupières lourdes.
J'entends les vendeurs des rues qui crient. Ces rues chaudes sont pleines d'hommes à la peau tanée, au regard dur, ils ont les sourcils épais et le nez fort. Ils regardent du coin de l'oeil les rares femmes qui ont osé sortir, avec un mélange de désir et de mépris. La foulée est fragmentée de couleurs, et d'odeurs brûlées comme l'air.
Sur les trottoirs, dans les échoppes, les marchands exposent des centaines d'objets alignés comme d'immenses collections. Je crois que les gens de ce pays aiment voir s'accumuler les babioles et se régaler de la vue de l'abondance : ils empilent deux cent assiettes similaires, cinquante tapis identiques, des milliers de bijoux qui remplissent et débordent de jarres énormes, ils suspendent côte à côte des dizaines de lampes à huile, des étoffes de toutes les teintes, et des paniers remplis de dizaines d'épices ocres,vertes, rousses, jaunes, dont je n'ai jamais goûté la saveur et dont j'ignore le nom.

Je ne sais pas où je dormirai ce soir. Quelque part dans la chaleur de la nuit, vraisemblablement.
Je m'assieds à la terrasse d'un café, ou plutôt je m'effondre dans un de ces empilements de gros coussins dont les tenanciers de ce pays ont le secret. Mon aspect exotique suscite immédiatement l'intérêt, et bien vite je me retrouve entouré de trois compagnons qui commandent pour moi le rafraîchissement traditionnel. J'espère secrètement que l'un d'eux voudra bien être mon hôte ce soir, mais pour l'instant je me contente de leur paraître agréable.
Celui qui porte une moustache, le plus grand, vient de sortir un morceau de parchemin et, à l'aide d'une vieille plume, il s'applique à dessiner ce qui m'apparaît peu à peu comme une carte du monde extrêmement approximative. Puis il me tend la plume. Je comprends qu'il veut savoir d'où je viens. Je trempe la plume dans le petit pot d'encre, je dessine un tout petit morceau de terre au Nord-Est de ce qui me semble être Kwanai, puis je fais une croix dessus. Les trois hommes hochent vigoureusement la tête, échangent quelques mots à la tonalité admirative dans leur langue chuintante. Puis le moustachu me reprend la plume, et trace une croix loin, loin d'Aïn'rê, quelque part sur la côte Nord de Néfer-Sund, à l'Est de Minoris-Dystrisia. Je ne pensais pas être si loin.
Les trois hommes me regardent, ils parlent encore dans leur langue. Je ne sais pas ce qu'ils disent. Ils parlent probablement de moi. Peut-être en bien ? Mon espoir de trouver refuge chez l'un d'eux me reprend. Alors je tente le coup, je mime le geste de dormir. Ils comprennent. Celui qui porte un chapeau, une sorte de toque rouge foncé, me tape sur l'épaule en disant quelque chose avec un grand sourire, puis il part d'un grand rire que rejoignent ses camarades. Se moquent-ils de moi ? Ou n'est-ce qu'une plaisanterie amicale ? Je m'efforce de rire avec eux.
Nous finissons nos verres – la boisson qu'on m'a servie, inconnue de moi jusqu'à présent, était d'une couleur bleu-vert inquiétante, mais s'avère finalement très fraîche et agréable – puis l'homme au chapeau me tape à nouveau sur l'épaule. Il se lève et m'aide à me relever. Il rit en voyant que je suis beaucoup plus petit que lui. Les deux autres me disent au revoir et s'en vont. Dans le brouhaha du café en bordure de rue, l'homme au chapeau se frappe la poitrine et dit : « Tariq ». Je dis : « Yhuk'ta. » Il hoche la tête, puis il me fait signe de le suivre.
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[rétro - 45 ans] Minoris

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