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| [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] | |
| Auteur | Message |
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Ferial Grindwell
Messages : 231 Date d'inscription : 11/01/2010 Age : 34
Age du Personnage : 21 ans Alignement: Loyal Neutre Classe - Fonction: Technologue - intermédiaire/agent secret
| Sujet: [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] Mar 12 Jan - 15:14 | |
| Je n’ai rien vu venir… J’ai juste laissé le temps filer sans me rendre compte à quel point un coup dur pouvait toujours s’abattre sur moi, à tout moment, et me faire un peu plus mal encore.Palais de Whittemore – Timberlake Place – 11 h 30Le temps semblait s’être arrêté sur Gillingham. La morosité du ciel n’avait pas bougé d’un pouce depuis des jours et l’air sentait l’humidité à plein nez. Les voitures pétaradantes cahotaient sur des routes trop usées, bouchonnaient vers les grandes places et klaxonnaient à tout va dans le brouhaha continuel de la cité. De jeunes garçons criaient les nouvelles du jour aux passants tout en brandissant leurs journaux. Des hommes de haute prestance et au fameux chapeau haut-de-forme s’arrêtaient pour leur en acheter un. Tout ce petit monde grouillant dehors ne se doutait pas qu’on s’affairait vivement dans tout le Palais Royal. Des portes s’ouvraient et se refermaient continuellement, laissant entr’apercevoir de magnifiques intérieurs brillant de mille éclats dorés, décorés avec de riches tapisseries et de grandes glaces. Du moins, les autres jours, car aujourd’hui le temps assombrissait les salles et on avait décidé d’allumer quelques lampes à Telifuel qui émettaient alors juste une lumière faiblarde. Thomas Mattherson, Secrétaire aux Affaires étrangères, s’avançait dans l’une des galeries du palais, un dossier sous le bras. Malgré son jeune âge – il avait à peine 35 ans – on lui avait confié la responsabilité de ce poste et en ce jour son rôle était plutôt de se charger de conduire une certaine personne jusqu’au bureau de Lady Olivia Hewitt, ministre de l’Information. De courts favoris bruns descendaient sur ses mâchoires et il était habillé d’une redingote en velours bleu sombre sur un pantalon de même couleur. Il marchait droit comme un piquet, fier comme un coq, as usual. Arrivé au bout du long couloir, il se planta devant les deux portes pour les ouvrir en grand. Dans la pièce, il ne s’étonna pas d’y découvrir une jeune fille, postée devant l’un des nombreux tableaux représentants la Reine, Alexandra III. Elle se retourna, ayant entendu son entrée. - Miss Grindwell, Lady Hewitt vous attend, veuillez donc me suivre je vous prie, fit-il d’une voix cérémonieuse en tendant une main vers le couloir. Ferial Grindwell resta silencieuse durant tout le trajet, les mains dans les poches de sa longue veste noire. Ce n’est qu’une fois qu’ils furent parvenus jusqu’au bureau de la ministre de l’Information qu’elle se plaça devant lui pour lui dire : - Toujours à jouer les larbins, à ce que je vois. Mattherson se crispa, puis toute trace de son sourire hypocrite disparue. Visiblement, Ferial venait de toucher un point sensible, et cela semblait d’ailleurs l’amuser plus qu’autre chose. - Grindwell, tenez votre langue, lâcha une voix autoritaire provenant de la pièce. La jeune fille s’avança vers un grand fauteuil rouge qui se tourna lentement en même temps qu’elle marchait. Une femme y était assise, ses longs et lourds cheveux blonds ramenés sur le haut de sa tête en une coiffure compliquée, un fume-cigarette dans l’une de ses mains au vernis rouge pétant. En fait, tout était rouge chez elle, que ce soit son fauteuil favori, sa robe fendue sur le côté (une nouvelle mode qui ne passait pas auprès des plus traditionalistes), ou son rouge à lèvre. D’un signe, elle congédia Thomas qui s’empressa de sortir – après avoir jeté un mauvais regard à Ferial, bien sûr. Mais celle-ci ne s’en préoccupa pas, l’attention fixée sur cette Lady à la fois si hautaine et charismatique. - Pourquoi suis-je ici ? embraya t-elle rapidement en oubliant les formules d’usages quand on rencontre une personne de la haute société. C’est mon unique jour de congé du mois et vous me faites traverser tout Gillingham pour me remettre une lettre… Vous auriez pu me la faire passer par un postier. - Non, on m’a fait promettre de te la donner en main propre. Et je suis une personne de parole, malgré tout ce qu’on pense de moi. - Vraiment ? Olivia Hewitt soupira et se dirigea vers son bureau pour s’y asseoir. - Écoute, ma petite Ferial, je n’ai pas envie de discuter pendant trois heures sur ce point. Si tu veux lâcher ta mauvaise humeur, va plutôt le faire sur cet imbécile de Mattherson. Il n’attend qu’une occasion pour te botter le derrière, et je ne l’en empêcherais pas. La jeune fille fit un grand sourire moqueur. - Ne me tentez pas. Alors, où est cette fameuse lettre ? - La voici. La grande blonde lui tendit le courrier apparut comme par magie de son décolleté plongeant. Ferial fit la grimace en le prenant du bout des doigts. - Arrêtez de glisser des trucs dans ce genre d’endroit. Vous n’êtes vraiment pas faite pour la politique, un cabaret de danse vous irez mieux. - Si tu m’avais sorti autre chose, je t’aurais bien botté le cul moi-même ! aboya-t-elle. Allez, dehors ! - Oui, Madame*. Ferial esquissa une petite courbette exagérée avant de sortir du bureau. Elle croisa Mattherson au passage qui revenait donner d’autres papiers à la Lady mais celui-ci ne fit que l’ignorer, ce qui l’arrangea bien. Il y avait de ces jours où elle sentait que quelque chose n’allait pas, et c’était bien le cas d’aujourd’hui. Dans ces moments-là, Ferial ne pouvait s’empêcher de jouer les insolentes, c’était plus fort qu’elle, bien qu’elle sache parfaitement qu’elle risquait de se brûler les ailes si elle continuait à agir ainsi. Mais l’hypocrisie ne faisait pas partie de sa petite personne. La plupart des politiciens en usaient très naturellement, de cette façade mensongère qui la dégoûtait tant, et depuis qu’elle était entrée dans ce cercle, elle s’était promis de ne pas devenir comme eux. Elle quitta le palais cinq minutes plus tard. Il s’était mis à pleuvoir. Mattherson contourna le bureau de la Lady pour déposer les dossiers devant elle. Olivia ne dit rien, fumant gracieusement sa cigarette, mais son regard suivit le déplacement du secrétaire qui revenait vers la porte. Avant de sortir de nouveau, il lui lança : - Vous ne lui avez rien dit ? - Ce n’est pas à moi de le faire. - Et vous croyez qu’elle le prendra comment quand elle saura ? La ministre sourit, la tête appuyée sur le dossier de sa chaise rembourrée. - Qu’est-ce que ça peut vous faire, Mattherson ? Il détourna le regard, le visage à demi éclairé par la lumière d’une des lampes. - Elle va encore moins nous faciliter la tâche à l’avenir, j’espère que vous vous en doutez. Il quitta le bureau avant que la Lady ne lui réponde quoi que ce soit. Elle le fit alors pour elle-même, une main posée sur la pile de dossiers. - Oui, je ne le sais que trop bien… [* en Astarnaïa dans le texte] |
| | | Ferial Grindwell
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| Sujet: Re: [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] Mer 13 Jan - 13:47 | |
| Gillingham. Ville cacophonique, dont les magnifiques et imposants bâtiments architecturaux de style néogothique se mêlent aux plus sordides bouibouis, de puissants zeppelins dérivant au-dessus d’eux tels des seigneurs du ciel, vigilance constante. Les voitures de métal carburant au Telifuel ou à la vapeur ne sont encore que des prototypes, mais très vite ils rattraperont les coches tirés par des chevaux piaffant sur les routes pavées. Quelques toits d’immeubles avaient été réquisitionnés pour y construire des garages d’aéronefs et autres engins volants qui fendent les cieux jusque par-delà les frontières du royaume. La gigantesque tour de Lonely Road est sous les armatures métalliques : on projette de la transformer en une horloge géante. Ferial Grindwell héla une diligence qui passa près d’elle, parce que c’est moins cher que les taxis à vapeur. Durant tout le trajet, elle eut la forte envie d’ouvrir la lettre, mais il était bien indiqué sur celle-ci qu’elle devait la lire seulement une fois rentrée chez elle. 12 Wester Lane Street – 11 h 55La demeure de son tuteur était tout en pierres grises et blanches, ses fenêtres en arcades donnant sur un petit jardinet à l’avant, et Ferial monta rapidement les petits escaliers pour franchir la porte d’entrée. Étrangement, personne ne l’attendait dans le vestibule, et elle rencontra seulement Penny la femme de chambre une fois arrivée dans la cuisine. La jeune femme n’avait seulement que deux ans de plus qu’elle mais déjà de petites rides de fatigue s’étiraient en dessous de ses yeux marrons. Sa chevelure châtain foncé avait été relevée en un chignon dont quelques mèches éparses s’y échappaient négligemment. Elle sourit quand elle vit Ferial, tout en terminant de briquer les casseroles qu’elle venait de laver. - Vous revenez déjà Miss ? Sitôt que je vous vois partir, vous êtes de nouveau ici. - On a pas eu tellement besoin de moi là-bas, répondit la petite brune en haussant les épaules. - Désirez-vous quelque chose à boire ? - Un thé, ça serait parfait. Merci ! Sur ces mots, Ferial fila tout droit vers le bureau de son tuteur. En chemin, elle passa devant des portraits des grands noms du royaume, croisa le chat Filibert et aperçut à un moment un vieil homme assit dans une chaise roulante, une couverture sur les genoux. - Bonjour Augustin ! fit-elle en allant rapidement l’embrasser sur la joue. Le vieil homme ne répondit rien, son regard aveugle perdu dans la contemplation d’une chose qui n’existait pas. Quelques mètres plus loin se trouvait la fameuse pièce vers laquelle elle se dirigeait. La jeune fille y entra vivement, déposa la lettre sur le bureau, et s’assit dans le large fauteuil en cuir de son tuteur. Elle resta immobile une petite minute, détaillant du regard l’écriture fine qui courait sur le papier jauni. Les lampes avaient déjà été allumées et leur douce lumière donnait une ambiance feutrée, intime, totalement en accord avec la personne même de son « maître », un homme mystérieux qui en disait peu sur lui. Des livres étaient à moitié ouverts un peu partout, des parchemins avaient été déroulés, et malgré le temps qu’elle avait passé ici, elle trouvait toujours un nouveau bouquin à lire. La bibliothèque était assez impressionnante, regroupant toutes les œuvres les plus reconnues dans tout Blend Awake, comme des traités d’Alchimie, des carnets de voyage tout droit venus d’Ekthranexos, racontant milles merveilles et découvertes, des autobiographies d’écrivains célèbres et de scientifiques respectés… Bref, la jeune fille avait l’embarras du choix, et sa curiosité était sans limites. Aujourd’hui, elle allait servir à découvrir ce que signifiait vraiment cette lettre. L’écriture était bien celle de son tuteur, Ferial était au moins certaine sur ce point. Mais ce qui la troublait le plus, c’était pourquoi elle l’avait reçu maintenant, pour quelle occasion ? Alors qu’elle l’avait vu encore hier soir et qu’il aurait très bien pu la lui donner à ce moment-là… D’un geste impatient, elle ouvrit la lettre avec l’aide d’un coupe-papier. En la secouant, un feuillet plié en deux et une clé en argent en sortirent dans un petit bruit cliquetant. La jeune fille prit la clé, la retourna dans tous les sens, puis ce fut au tour du feuillet, qu’elle déplia avec précaution, car il semblait aussi fragile que du papier de soie. Elle y lut, après avoir posé ses lunettes sur son nez : Vérité. Coffre numéro 14 place Whittemore. S.JUn de ses sourcils se releva, perplexe. Il s’agissait aussi de l’écriture de son maître, mais elle eut l’impression que les mots avaient été écrits à la hâte, comme s’il n’avait pas eu le temps. L’encre avait mal séché et résultat, quelques tâches souillaient le papier ici et là. S.J… St John. Ferial releva la tête, la mine inquiète. - Monsieur… Qu’est-ce que vous voulez me dire ? chuchota-t-elle pour elle-même. On toqua à la porte. Son attention se fixa alors sur George, le majordome, qui entra dans la pièce d’abord sans un mot, l’air grave. Il fit une brève révérence avant de dire : - Miss Grindwell, je crains de vous annoncer que Monsieur St. John a disparu. Ferial lâcha la clé. - Je vous demande pardon ? - Monsieur St. John a disparu. - Oui… D’accord… Mais, quoi ? - Monsieur… - Stop ! Elle se leva vivement et le rejoignit, le feuillet froissé dans son poing. - C’est une farce, c’est ça ? balbutia-t-elle en le fixant de ses yeux bleus écarquillés. - Miss, sauf votre respect, je ne suis pas du genre à faire des farces. - … C’est vrai. La petite brune se détourna brusquement, une main sur le front, se forçant à ne pas pleurer. Non, non, non, pas ça… ! Pas ça ! Pas maintenant ! Pas comme ça !- Miss ? - … - Miss Grindwell, je suggère que vous preniez les décisions qui conviennent à ce genre de situation. - Lesquelles ? Quelles peuvent être les bonnes décisions à prendre dans des moments pareils ? s’écria brusquement Ferial, en proie à cette colère qui lui avait été si familière durant un temps désormais révolu. Ils reprenaient le dessus. Ces sentiments qu’elle n’avait plus du tout envie de ressentir, cette fureur au goût amer qui n’avait plus eu sa place dans cette nouvelle vie, elle revenait soudain la hanter. Le majordome s’approcha mais la jeune fille recula d’un pas. Elle semblait plus sauvage qu’un animal effarouché. George stoppa son avancée et baissa les yeux dans une attitude appelant uniquement au calme. - C’est à vous désormais de reprendre le flambeau qui incombait jusque-là à Monsieur. - Pourquoi… moi ? - Il l’a décidé lui-même, de ce fait je ne peux malheureusement pas répondre à cette question. Je n’en sais absolument rien. - AH ! Ça c’est tout lui ! Ne jamais rien dire quand il le faut ! s’exclama t-elle en levant les bras au ciel. - M… Monsieur est parti ? fit une petite voix timide derrière le majordome. Les deux se retournèrent pour voir une Penny affligée juste sur le pas de la porte, tenant de ses mains désormais tremblantes un plateau couvert d’un service à thé. George s’approcha d’elle pour lui retirer le plateau des mains et le poser ensuite sur la table basse voisine. Il voulait quand même éviter le plus de casse possible. - Penny, cette affaire ne vous concerne pas. Retournez plutôt en cuisine, il est bientôt l’heure du déjeuner et vous n’avez encore rien préparé, dit-il d’une voix ferme. - Non ! Laissez là ! cria Ferial en pointant un doigt sur lui. Penny, peux-tu venir ici s’il te plaît ? La femme de chambre s’exécuta, non sans cacher son étonnement vis-à-vis de l’attitude étrange de sa jeune maîtresse. Celle-ci posa ses mains sur ses épaules et fixa son regard dans le sien. Elles étaient toutes les deux assez petites mais Penny dépassait quand même Ferial de quelques centimètres. Ça ne l’empêcha pas d’agir comme si elle avait été la souris la plus minuscule du monde. George se tut, mais on pouvait lire dans son regard qu’il n’allait pas approuver ce qu’elle s’apprêtait à dire. - Penny, pour toi et moi, je ne vais pas y croire. - Q… Quoi ? - Je vais attendre son retour. Je vais attendre qu’il revienne parce qu’il va revenir, tu entends ! Je ne veux pas croire qu’il ait disparu. On parle quand même de St. John. Il ne disparaît pas pour des pacotilles. - Ce que vous dites n’a aucun sens, Miss Grindwell. - Chut ! Ce qui est dit est dit. Elle se détourna de la jeune bonne et croisa les bras. Une lueur de détermination avait remplacé celle de colère dans ses yeux clairs. Il était vrai qu’elle lui avait promis de ne pas le chercher si jamais il devait disparaître. Il était vrai qu’elle n’avait pas le droit de rompre cette promesse, parce qu’elle respectait toujours ce qui était dit entre elle et son tuteur. Alors, la seule chose qui lui restait à faire, c’était d’espérer. ** Palais de Whittemore – Timberlake Place – 12 h 03Lady Hewitt soupira. On l’avait invitée à déjeuner mais une fois encore elle avait du refuser, stipulant qu’elle avait encore du travail à terminer. Son poste ne lui permettait pas de gérer elle-même son emploi du temps, les tâches avaient été prédéfinies à l’avance, et de ce fait elle devait s’y contraindre. C’était le prix à payer pour faire partie du gouvernement de sa Majesté. Elle glissa tout de même un tube dans le conduit de la messagerie interne pour commander un petit quelque chose à manger. Elle n’allait tout de même pas boucler ses dossiers le ventre vide ! Il en était hors de question. Le tube, protecteur d’un petit papier, fila immédiatement dès qu’il fut inséré dans le trou. Le clapet se referma automatiquement grâce à un ressort et Olivia ramena son attention sur le carnet de rendez-vous ouvert devant elle. On toqua à sa porte quelques minutes plus tard. Un des employés du Palais entra pour déposer un plateau sur la table ronde du milieu. - Qui d’autres en a commandé ? demanda la Lady en relevant son nez de ses papiers. - Lord Bell et Lord Leach. - De vrais bourreaux de travail, ces deux-là… - Pas plus que vous, fit une voix familière. Olivia s’alluma une nouvelle cigarette et tira une longue bouffée avant de répliquer : - Oui mais moi je suis enchaînée à ce bureau, telle une esclave de cette satanique chose qu’on appelle l’administration… Mattherson, vous joindrez-vous à moi pour le déjeuner ? La fumée blanche dansa autour d’elle tandis que le secrétaire aux Affaires étrangères s’avançait dans la pièce. - Navré, mais je dois retrouver ma femme tout à l’heure. Je lui ai promis de passer un peu de temps avec elle, aujourd’hui. - Oh ! Espèce de vil menteur, vous n’êtes absolument pas désolé ! gémit-elle en le repoussant virtuellement d’un geste de la main. Votre femme, votre femme… il n’y en a que pour elle ! - Ne dites pas ça ! Vous savez très bien que mon travail exige de moi une présence constante en ces lieux, et de ce fait je ne réussis à la voir qu’une fois la semaine, le dimanche ! s’indigna-t-il vivement. Lady Hewitt se pencha, recouvrant la surface de son bureau de son ample poitrine, son visage soudain un peu plus sérieux. - J’imagine qu’à l’heure actuelle, elle doit avoir lu la lettre. - Vous savez ce qu’elle contient ? demanda-t-il, encore un peu gêné. - Non, mais je sais de qui elle est. Et je sais aussi pourquoi l'expéditeur n’a pas choisi de la lui donner en main propre. - Alors… IL a vraiment disparu ? Thomas affichait dés à présent un air grave et il passa nerveusement une main sur son col, sans doute un peu trop serré. Olivia se rassit correctement dans son fauteuil et ouvrit un des dossiers provenant de la pile à ses côtés. - Mattherson, parlez-moi de cette histoire avec nos voisins… Celle où ils nous demandent un « prêt » de Trolls ? - Hum… Oui, Lady, bredouilla-t-il finalement après un instant d’hésitation étonnée, il paraîtrait que les technologues de Middle-City sont en manque d’effectifs trolliens et ils nous demandent donc s’ils peuvent récupérer quelques-uns des notre en échange d’un transfert de technologie. - Quelle sorte d’échange ? - Ils sont d’accord pour nous montrer comment construire des bombes à partir de Telifuel. - Vraiment ? Intéressant… Vous pouvez disposer. Il la regarda avec surprise. - Vous ne voulez pas plus d’informat… - Ça suffira. Je laisse tout ce qui touche de loin ou de près à l’armement aux bons soins de Windham, répondit-elle avant de faire un grand sourire. Et Dieu m’en est témoin qu’il adore traiter ce genre d’affaire… |
| | | Ferial Grindwell
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| Sujet: Re: [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] Dim 17 Jan - 12:54 | |
| J’aurais dû me faire une raison. Le temps passe toujours trop lentement quand on s’obstine à vouloir attendre. Et moi j’ai attendu, attendu, attendu qu’il se passe quelque chose. Que la lumière se fasse dans mon esprit et que toutes mes questions trouvent des réponses. Mais, comme d’habitude quand il s’agit de lui, je reste dans le brouillard le plus total. C’est si frustrant de ne rien faire quand tu sais que tu es capable pourtant d’y arriver. Trois mois se sont écoulés depuis sa disparition. J’ai eu dix-neuf ans et il n’a pas été là pour me dire encore une fois que malgré les années, je resterais toujours une gamine (oui, ça fait toujours plaisir à entendre…). Parfois, il me vient à croire qu’il est en train de m’observer par la fenêtre, ou qu’il me suit dans la rue, parce que depuis que je le connais, j’ai constamment eu l’impression qu’il était derrière moi. Il est le pilier sur lequel je peux me reposer quand ça ne va pas. Dans toutes sortes de situation, il était là pour me soutenir, et même s’il ne le disait ou ne le montrait pas directement, je sais qu’il s’en rendait parfaitement compte. J’ai tellement peur de découvrir que ce n’est pas une véritable disparition, comme quand on enlève quelqu’un ou que le bateau sur lequel vous êtes coule en plein milieu d’une tempête. Je ne sais pas si le pire est envisageable avec lui… La Mort a peut-être frappé à sa porte.- STOP ! Deux silhouettes couraient éperdument dans les ruelles profondes du quartier Nord de la ville. D’épaisses volutes de fumée s’échappaient des cheminées sur les toits et redescendaient se mêler au fourmillement continuel des ouvriers qui rentraient chez eux après une longue journée passé au travail. Ils semblaient tous se fondre totalement dans l’obscurité des rues avec leur figure couverte de suie ou de cambouis. Tous se saluaient quand ils reconnaissaient un camarade ou un voisin, la bonne entente régnait même si le boulot harassait les esprits et les corps de chacun. Mais on s’en fichait, car ce qui comptait c’était l’argent ramené à la maison, et boire une bonne bière au pub très tard le soir. L’alcool coulait à flot, les rires gras fusaient, mais personne ne se doutait qu’en attendant des criminels étaient pourchassés. Une voix mécontente retentit une nouvelle fois dans la cohue ambiante : - ARRÊTEZ-VOUS, AU NOM DE LA REINE ! Ferial percuta l’angle d’un mur qu’elle n’avait pas vu. Un peu sonnée, elle resta interdite tandis que l’homme qu’elle suivait s’enfonçait dans le brouillard créé par la fumée des cheminées et par la pollution générée par quelques machineries. Elle jura mais son cœur battait tellement vite dans sa poitrine à cause de la course folle qu’elle venait de faire qu’il lui était difficile de continuer à se plaindre. Quelqu’un la rejoignit par derrière et lui posa une main sur l’épaule, tout aussi essoufflé qu’elle. - Qu’est-ce que… Qu’est-ce que tu fais ? La jeune fille jeta un coup d’œil au grand noir du nom de Shane qui lui servait de collègue pour cette mission. Elle semblait collée au mur de briques rouges qui l’aidait à ne pas s’écrouler sur le goudron boueux. - Je… hais… les courses poursuites… réussit-elle à articuler entre deux souffles saccadés. Je ne suis… pas faite… pour ce genre de chose… - Tu crois… peut-être… que c’est mieux… de s’occuper de la paperasse… dans les bureaux ? Allez… reprends-toi… Ou il va nous filer entre les doigts ! Il la prit soudain par un bras et l’entraîna à sa suite vers une nouvelle course dans les rues. Heureusement pour eux, une masse considérable de fêtards enivrés sortait d’une des nombreuses et grandes salles des fêtes du quartier et le temps de se faufiler entre eux pour rentrer à l’intérieur, les deux agents purent constater qu’il s’agissait bien du trafiquant de drogue qu’ils poursuivaient. Ils se frayèrent donc un chemin à leur tour, évitant au passage de se faire trop bousculer, ou pire, vomir dessus par tous ces poivrots agitant leurs bouteilles. Musique d'ambiance - Irish violin en folie !La salle des fêtes semblait encore plus immense de l’intérieur. Une troupe de musiciens donnait le ton avec leur violon fou et leur banjo mangés par les mites. Des couples dansaient au milieu de la salle, chantant et criant leur joie à chaque pirouette. La fatigue, le stress et les tristes mines n’étaient plus que des mauvais souvenirs durant ces uniques heures de liberté bien méritée. Une cornemuse s’éleva dans le fond de la salle et son rythme enchanté se mêla aussitôt à la musique de la troupe. Ferial et Shane durent s’arrêter de nombreuses fois pour éviter de se faire piétiner par les danseurs. À un moment l’un d’entre eux invita la jeune fille à y participer avec lui, alors elle s’accrocha très vite au bras de Shane pour faire croire qu’ils étaient déjà ensemble. Très vite, ils se laissèrent entraîner par la fougue ambiante et leur traversée se fit dans une danse afin de faciliter leur avancée. Car quand on se prend dans le rythme, tout semble glisser avec naturel. À un moment, Ferial fut brusquement séparée de son compagnon par une femme au décolleté un peu trop plongeant et elle se retrouva alors perdue et seule au milieu de la foule grouillante. Elle tenta tant bien que mal de s’en dépêtrer, jusqu’à ce que son regard soit attiré par une silhouette familière. Un sourire se dessina sur ses lèvres et elle se hâta vers un homme qui était de dos. - Excusez-moi ? dit-elle en lui tapotant l’épaule d’un doigt. Le poursuivant se retourna et resta abasourdi en voyant la petite brune censée l’arrêter lui faire un grand sourire en se balançant sur ses pieds. - Coucou ! Une petite danse ? Un clin d’œil suffit et tout s’enchaîna. L’homme battit en retraite vers le fond de la salle, tout près d’une large estrade où un cracheur de feu impressionnait une galerie de spectateurs par ses prouesses flamboyantes. Le criminel bouscula quelques personnes au passage, qui lâchèrent alors des jurons dans leur mécontentement, et Ferial comprit qu’il se dirigeait tout droit vers la sortie de secours. Si jamais il venait à franchir la porte, elle ne pourrait pas le rattraper, car derrière se trouvait un véritable labyrinthe de ruelles obscures qui en avaient perdu plus d’un. Bref, ça risquait d’être bien pire que durant la première course-poursuite. Contre toute attente, la jeune fille partit dans un autre sens. Elle parvint rapidement – et grâce à de nombreux coups de coude – à franchir la distance qui la séparait de l’estrade. Elle monta d’un pas chancelant les quelques marches du petit escalier en bois qui permettait d’y accéder et elle s’accrocha au bras d’un grand baraqué au t-shirt blanc moulant rayé de bleu. Musique d'ambiance - Stopper le truand !- A… Arrêtez-le s’il vous plaît ! demanda t-elle en pointant son doigt vers le fuyard, il travaille pour le compte d’un riche bourgeois qui l’a envoyé pour vous espionner et noter toutes les mauvaises choses qui pourraient être dites sur lui ! Les ouvriers ainsi accusés de calomnie pourraient êtres renvoyés ! Cela suffit à convaincre le géant au brillant crâne chauve qui fixa son regard sombre et pas content sur l’homme. Dans un geste, il ramena la torche enflammée devant sa bouche et souffla sa réserve d’alcool sur la flamme qui grandit et barra aussitôt la route du criminel. Celui-ci, totalement surpris par l’attaque, tomba sur le cul. Le cracheur de flammes envoya deux de ses amis interpeller l’homme et Ferial put soupirer de soulagement. Shane apparut à peine une minute plus tard pour passer les menottes aux poignets du malfaiteur. Les deux agents remercièrent le grand gaillard et ils purent enfin sortir de la salle des fêtes – Mission accomplie ! |
| | | Ferial Grindwell
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| Sujet: Re: [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] Lun 18 Jan - 19:23 | |
| [ HS : Désolée, je voulais pas que ça soit aussi long mais pourtant ça l'est ! mouhahaha... bonne lecture.]La lumière du soleil balaya doucement l’intérieur de la chambre. Les rideaux n’étaient pas assez épais pour l’empêcher d’entrer mais suffisamment opaques pour amoindrir sa vivacité. La couverture du lit à baldaquin noir remua ; un bras en ressorti et tapota un peu dans le vide jusqu’à trouver la table de chevet. Ferial émergea de sous ses draps en bâillant. Après s’être frottée ardemment les yeux (la douceur n’étant point son fort), elle mit ses lunettes sur son nez et cligna des paupières jusqu’à ce que sa vision ne soit plus floue. On toqua doucement à la porte et Penny entra, la tenue de sa jeune maîtresse dans les bras. Elle la posa soigneusement sur le bord du lit et attendit patiemment que Ferial soit un peu plus réceptive au monde pour faire attention à elle. - B’jour Penny… dit finalement la jeune fille au bout de quelques minutes de flottement. - Bonjour Miss ! Vous avez bien… - Ne pose pas la question quand tu connais la réponse… - Ah ah… ^^’ Comme à son habitude quand il faut sortir du lit, Ferial se leva trop rapidement, et elle chancela alors durant plusieurs minutes. Après rétablissement de son équilibre, elle put s’habiller, enfilant son éternel gilet rayé noir au-dessus d’une chemise blanche et d’un court et sombre pantalon. Elle fourra ensuite son passe dans sa poche arrière, qui prouvait qu’elle était bien un agent de sa Majesté. L’extérieur fourmillait déjà de vie alors qu’il était à peine sept heures du matin. Le brouhaha des rues parvint à traverser les murs de la demeure pour couvrir son silence serein et même quelques aboiements de chien se laissaient entendre dans le lointain. Ferial descendit promptement tous les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée (et il y en avait un paquet !), le bruit de ses pas atténué par le long tapis cloué aux marches. George l’accueillit dans la cuisine avec une assiette de toasts grillés et beurrés, en plus d’une tasse de chocolat chaud qui fumait dans son autre main. Elle les prit au passage et le temps d’aller s’asseoir pour lire le journal, elle avait déjà tout englouti. Le chat roux Filibert sauta sur le canapé à son entrée dans le salon. Elle titilla le bout de son nez avec l’un de ses doigts et il le lécha avec gourmandise. Le temps semblait clément aujourd’hui. La masse sombre de nuages qui s’étaient accumulés depuis quelques jours commençait à s’estomper dans le ciel, laissant place à quelques jambes de Dieu illuminant certains endroits de la grande cité. L’horloge sonna sept heures et demi. Ferial s’empressa de revêtir son long manteau noir avec l’aide attentionnée de Penny, puis elle quitta la demeure en saluant les deux serviteurs, réunis dans le vestibule. Depuis que St. John n’était plus là, la jeune fille avait été obligée de remplir quelques tâches administratives. L’unique lien de parenté qu’elle connaissait de cet homme était Augustin, son grand-père, mais ce vieil homme de quatre-vingt-onze ans n’avait plus toute sa tête et ses infirmités ne lui permettaient pas de faire quoique ce soit. De ce fait, et parce qu’elle était prétendument la fille adoptive de St. John – aux vus des nombreux papiers qu’il avait signés pour sa sortie de l’orphelinat de South Borrow – Ferial devenait la légitime légataire de toutes ses possessions ; que ce soit la maison ou les serviteurs, tout lui appartenait désormais. Devait-elle s’en réjouir ? Cela lui était difficile car elle avait longtemps eu l’habitude de vivre dans une certaine misère, celle de l’orphelinat, des soupes coupées à l’eau quand il n’y avait plus assez d’argent, des matelas rembourrés à la paille et des douches froides très tôt le matin. Oui, tout ceci avait bien été une réalité pour la jeune fille. Mais au fur et à mesure que les années passaient, que les nombreux orphelins grandissaient, l’argent commençait enfin à affluer, de plus en plus, et ce grâce aux travails des plus âgés, et à quelques généreux donateurs dont elle ne connaîtra sans doute jamais les noms. Le taxi qu’elle avait appelé s’arrêta dans un crissement de pneus. Quand elle en sortit quelques minutes plus tard, l’énorme ombre d’un zeppelin passa au-dessus de sa tête dans un vrombissement impressionnant. Ferial leva les yeux vers lui. Le blason royal était collé à sa toile d’un bleu terne. - Vous venez bien tôt aujourd’hui, fit une voix derrière elle. - J’ai rendez-vous, répondit la petite brune en constatant l’arrivée d’une minuscule femme affublée d’un grand chapeau à fleurs. Lady Jones, comment allez-vous ? - Très bien et vous ? sourit-elle avec amabilité. - On fait aller. Aujourd’hui ressemble à tous les autres jours pour moi. - À chaque fois que je vous vois, j’ai l’impression que tous les malheurs du monde sont en train de peser sur vos épaules, dit la replète femme en l’invitant à la suivre dans le bâtiment qui jouxtait le palais. Vous êtes jeune, et cela m’attriste de vous voir aussi fataliste. Ferial sourit mais ne répondit pas, les mains dans les poches. Quand elles entrèrent, une nuée de domestiques vinrent les accueillir et après les avoir débarrassées de leur manteau, deux d’entre eux les conduisirent jusqu’au premier étage. Millie Jones, qui était la Ministre de la Santé publique, tourna à gauche tandis que Ferial continua sa route dans le long couloir qui se déroulait devant elle, sans oublier de saluer une dernière fois la petite femme au passage. Au bout du couloir se tenaient deux gardes, bien droits dans leurs bottes noires cirées, la lance au poing. Ils croisèrent leur arme à l’arrivée de la jeune fille qui dut alors sortir son passe et le leur présenter. La double porte dorée qu’ils surveillaient s’ouvrit alors comme par magie, mais ce n’était en fait que grâce à la présence d’un système de machinerie à l’intérieur des battants et que les deux gardes actionnaient en appuyant sur un dallage secret du bout de leur lance. Ferial entra pour découvrir une autre double porte qu’elle ouvrit vers elle. Derrière se trouvait une cage d'ascenseur, seulement éclairée par une petite ampoule qui clignotait par intermittence. On ne semblait pas l’avoir changé depuis un bout de temps. L’impression d’un certain état de délabrement couvrait également le reste de l’ascenseur, mais temps que tout fonctionnait, personne ne toucherait à rien. La jeune fille entra dans la cage sombre et appuya sur l’unique bouton du cadran. La machine se mit en marche dans un cahot grinçant. Musique d'ambiance (et non d'ascenseur)L’ascenseur s’arrêta à peine une minute plus tard. Au lieu de descendre, comme on aurait pu le croire en le voyant ainsi dissimulé aux yeux des curieux, il était monté de plusieurs étages, vers une aile du palais qui était uniquement réservée à l’agence gouvernementale nommée le Bureau. Aucune porte, aucun couloir ni accès de quelque sorte ne permettait d’y accéder. Tous les passages précédents avaient été bouchés pour plus de sécurité et de tranquillité. Car les affaires dont on parlait ici étaient les plus secrètes du royaume. Ferial monta quelques marches et se retrouva alors dans la grande salle de réunion, illuminée par un lustre magnifique accroché au haut-plafond, dont les fresques dépeignaient une antique époque que les technologues avaient connue sur Mathétopia. Son regard se perdit un instant dans leur contemplation, comme à chaque fois qu’elle venait ici, elle ne pouvait s’empêcher de les admirer. Peut-être aurait-elle fait des études d’Art si ses parents avaient été encore vivants. Il paraîtrait qu’elle était plutôt douée en dessin. - Quelle ponctualité. Vous êtes une employée modèle, Miss Grindwell, lança une voix légèrement sarcastique. Ferial baissa lentement les yeux vers Lady Hewitt, qui se tenait appuyée un peu plus loin sur une des tables vernies de la salle. Derrière elle étaient en train de discuter Mattherson avec le Ministre de la Défense, Lord James Windham, qui s’arrêtèrent dès que la petite brune se fut approchée d’eux. Elle salua les deux hommes d’un mouvement poli de la tête. - Si Lord Windham se trouve ici, ça veut dire que je ne suis pas venue pour rien… dit-elle sur un ton très naturel. Olivia ne broncha pas sur l’impertinence de la jeune fille mais ses yeux étaient désormais aussi froids qu’un iceberg dérivant dans les mers de Septemtrion. Au contraire d’elle, le ministre de la Défense émit un petit rire amusé. Il portait une jaquette grise sur une cravate noire qui s’accordait avec ses yeux tout aussi sombres. Ses cheveux poivre et sel étaient plaqués en arrière par de la gomina et il avait le tic de les lisser dès qu’il se sentait gêné par quelque chose. Il rangea ses lunettes dans une des poches de devant de sa veste et s’approcha ensuite de la jeune fille. - Miss Grindwell, nous vous avons appelé aujourd’hui pour vous annoncer une très bonne nouvelle, dit-il d’une voix grave et faussement sympathique. - Comment ça ? fit la jeune fille en le regardant d’un air parfaitement perplexe. Vous… - Que diriez-vous de faire un petit voyage hors de nos frontières ? Le ministre tapa dans ses mains et un domestique vint lui apporter quelques feuilles posées sur un plateau d’argent. Il les prit et commença à les feuilleter négligemment du bout des doigts. - Voici les différents dossiers essentiels qui vous éclaireront une fois que vous serez arrivée à bon port. Il s’agit de plusieurs ordres de missions qui n’ont pas été complétés… - Attendez, attendez une seconde, le coupa soudain Ferial, un doigt pointé en l’air. De quoi me parlez-vous ? Vous ne pouvez pas tout m’expliquer depuis le début, s’il vous plaît ? Ça m’aiderait à y voir plus clair. - Mais certainement, répondit-il en posant les dossiers sur la table afin de croiser les bras. Vous avez eu une promotion, Miss Grindwell (elle le regarda comme s’il y avait une tâche de moutarde éclaircissant sa fine moustache). De ce fait, vous pourrez désormais opérer dans le monde entier et ce sous la protection divine de Sa Majesté. Et votre première mission hors de cette ville se fera dans l’archipel d’Apartadiza, plus exactement à Range Harbor, qui réunit toutes les cultures de Blend Awake, et donc tous ses potentiels criminels. - Un endroit à surveiller en particulier, renchérit Lady Hewitt, les bas-fonds du Consortium. C’est là que se trouvent toutes les pires crapules de nos compatriotes technopolitains. - Exactement. Alors, qu’en pensez-vous, Miss Grindwell ? Ferial resta sans voix une petite minute avant de répondre sur un ton grondant : - J’en pense que… Je ne suis pas d’accord. - Pardon ? dirent en chœur les deux ministres. La jeune fille tenta de maîtriser la colère sourde qui montait en tremolo dans sa voix, mais c’était peine perdue. Elle avait cru pendant un instant qu’on lui annoncerait autre chose, et désormais elle avait une folle envie de hurler toute sa frustration. - Je croyais que vous alliez me dire que vous aviez retrouvé Monsieur St. John. Qu’il était là, quelque part dans l’une de nos salles, et qu’il m’attendait, son habituel sourire plein de fierté aux lèvres. Et, en fin de compte, tout ce que j’entends c’est que je vais être mutée dans un trou paumé parce que, prétendument, il y aurait peut-être quelques dangers que je pourrais arrêter une fois là-bas ? Je ne veux pas partir ! Imaginez qu’il revienne entre temps, il pensera que je l’ai oublié. Que j’ai pris sa place ! - Quel charivari d’absurdités… - Oui, mesure tes paroles, petite idiote, persifla Olivia Hewitt en brandissant un poing menaçant. Mais Ferial ne fut nullement impressionnée. Elle avait l’habitude de les déranger par ses mots et même par ses actes, et dès à présent tout ce qu’elle souhaitait c’était dire ce qu’elle avait sur le cœur. - Je ne peux pas aller à Range Harbor. Qui s’occupera de la maison en mon absence ? Et que deviendront George et Penny ? Je serais bien incapable de les laisser. - Et pourtant, il le faudra bien, lâcha Windham en commençant à faire les cent pas entre la porte et la table du fond. Vous êtes un agent de la Reine. Votre rôle est de tout faire pour lui rendre service ! Jamais aucun de vos collègues n’aurait refusé une telle offre. Il se retourna vers elle vivement, les yeux furibonds. - Vous rendez-vous compte que voyager à travers le monde est la consécration pour un agent secret ? Nous vous accorderons une liberté totale, de l’argent à volonté, et toutes les frontières vous seront ouvertes ! - J’en doute fort… Pour la liberté, je veux dire. Je sais que vous aimez bien envoyer quelques-uns de vos larbins pour nous surveiller. Constater si nous sommes dignes d’être des agents de la Reine, je me trompe ? - Petite… ! - Un instant. Tous se tournèrent dans un même mouvement vers Mattherson qui n’était pas intervenu jusque-là. Celui-ci s’avança vers Ferial pour lui présenter les dossiers qu’il avait pris sur la table en passant. - Je vous jure devant Dieu, Ferial, que nous nous occuperons de vos domestiques. Chaque mois leur sera envoyée une partie de votre salaire pour leur permettre de se gérer en votre absence. Si vous n’y voyez pas d’inconvénients, bien sûr. La jeune fille le fixa d’un air surpris. C’était bien la première fois qu’il prononçait son prénom, et cela voulait simplement appuyer sur sa sincérité. Elle savait qu’il était un homme honnête, et malgré les nombreuses piques qu’elle lui envoyait parfois, elle le respectait pour son intégrité en tant qu’homme d’état. - Mattherson… ! s’indigna Hewitt. - Très bien, faisons comme ça alors, répliqua Ferial en prenant les dossiers en main, et faisant sursauter par la même les deux ministres qui ne s’attendaient guère à un revirement si bref de sa part. - Vous… vous acceptez ? balbutia Olivia en la regardant avec des yeux ronds. - Oui, puisqu’on m’assure que l’on pourra subvenir aux besoins de mes « domestiques » en mon absence. - Mais, nous n’avons pas le droit ! - Lord Windham, dans la mesure où ce sera l’argent de mon salaire qui leur sera envoyé, je ne vois pas en quoi ça pourrait vous poser un problème. - Certes, mais… - Bon sang ! Vous voulez que j’y aille oui ou non ?! Les trois politiciens s’entre-regardèrent avant de hocher la tête dans un même ensemble. - Bon ! Voilà qui est réglé ! Quand est-ce que je pars ? - Le plus tôt possible sera le mieux, se reprit Windham, lissant ses cheveux. Ce soir, ce serait parfait. - Laissez-moi le temps de me préparer aussi. Je vous garantis que je serais dans le bateau dès demain matin. Mais avant, non, impossible. - Hum… Très bien, puisque vous le dites. Lady Hewitt fit un geste dédaigneux de la main vers la porte. - Vous pouvez y aller, Grindwell. La jeune fille se dirigea vers la porte, un petit sourire d’autosatisfaction étirant ses lèvres. Elle se retourna une dernière fois vers les trois politiciens afin de leur lancer : - Ne vous inquiétiez pas, je vous enverrais pleins de « cartes postales » ! Madame, messieurs*, à très bientôt. Et elle referma la double porte derrière elle. [* en Astarnaïa dans le texte] |
| | | Ferial Grindwell
Messages : 231 Date d'inscription : 11/01/2010 Age : 34
Age du Personnage : 21 ans Alignement: Loyal Neutre Classe - Fonction: Technologue - intermédiaire/agent secret
| Sujet: Re: [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] Mar 19 Jan - 14:31 | |
| Dès que Ferial fut partie, Windham se tourna vers Olivia, les traits crispés dans une expression légèrement coléreuse. - Comment pouvez-vous supporter cette… gamine ?! Je me demande encore ce qu’elle peut bien faire ici ! - Nous n’avions pas le choix… C’est St. John qui nous l’a imposé, et je vous rappelle qu’il est le petit chouchou de la Reine. - Peut-être, mais je vous signale qu’Elle était Elle-même assez réticente au début. Il a fallu que Grindwell nous prouve sa loyauté, et elle l’a fait ! - L’évidence est là, alors arrêtez de vous plaindre, Lord Windham. Olivia expira un nuage de fumée. Mattherson en profita pour intervenir : - Lord, Lady, je vais devoir vous laisser. Du travail m’attend. - Mais vous ne pensez qu’à ça franchement! s’exclama Lady Hewitt. - C’est vrai. Détendez-vous un peu avec nous, Mattherson, renchérit Windham en s’approchant de lui. Le secrétaire secoua la tête. - Non, je ne peux pas assister à ce genre de conversation. À tout à l’heure. Le ministre de la Défense siffla tandis que l’homme d’état se dirigeait vers la porte. - Bien évidemment, ceci est votre véritable raison ! Une conduite irréprochable au sein de notre gouvernement ne vous aidera jamais à gravir les échelons, croyez-moi ! Mattherson ne répondit rien et ne se retourna même pas pour saluer une dernière fois les deux politiciens. Il disparut simplement derrière la double porte. Windham alla se servir un verre de Whisky et en proposa un à Olivia qui accepta d’un mouvement de tête. Ils burent une gorgée chacun avant que le ministre ne déclare : - Voilà, l’affaire est lancée. Voyons ce que tout ça donnera une fois qu’elle sera là-bas. - Au moins elle ne fouinera plus. Ce n’est pas ce que vous vouliez ? - Certes, mais elle ne se doute pas qu’en l’envoyant à Range Harbor, nous la protégeons. - Une enfant ne mérite pas de connaître la vérité mais plutôt de subir la dure réalité en traînant dans les plus infâmes bas-fonds… C’est ça ? - Vous semblez sceptique, Lady Hewitt. Windham se rapprocha de la femme qui était assise gracieusement sur la table, les jambes croisées et le buste fièrement bombé. D’une main, il lui caressa doucement la joue et descendit lentement jusqu’à dessiner du bout des doigts la forme un peu trop prononcée de ses clavicules. Elle le laissa faire, aussi immobile qu’une statue, ses yeux de glace fixés sur lui. Puis, soudain, elle lui attrapa la main et le ramena de force vers lui, coinçant l’une de ses jambes dans son dos. - Nous verrons bien, lui murmura-t-elle à l’oreille. Et ils s’embrassèrent avec fougue. * Il ne m’en voudra pas. Parce que ce n’est pas moi qui ai décidé toute seule d’y aller, j’ai juste été obligée par pur respect envers ceux qui m’emploient. Il ne m’en voudra pas. Range Harbor. Je n’y avais jamais pensé, mais aller là-bas pourrait peut-être me mener sur une piste ! Je ferais mon boulot, je mentirais, je filouterais, puis derrière je prendrais des initiatives afin d’en découvrir un peu plus sur… Il ne m’en voudra pas ! Je le trouverais, quoiqu’il en coûte, quoiqu’il se passe. Mais oui, c’est une excellente idée ! Il ne m’en voudra pas…
Je vais venir vous chercher, Monsieur. |
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| | | | [Retro - 2 ans] La lettre [Nouvelle-Thulée du sud, à Gillingham] | |
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