12 septembre 247 - Maison secondaire des Montberry, chez Honoré de Montberry, 10 pm

Le métal du pommeau de sa canne étincelait toujours différemment selon l’inclinaison de celui-ci. Il était arrondit, lisse, argenté mais reflétait le feu de bois qui dansait dans la cheminée, ce qui donnait à l’objet l’impression d’être en or massive. Ses doigts faisaient tourner celui-ci, suivant un mouvement de va et vient inversé du pouce des autres doigts qui pinçaient le bois de la canne. Quel mécanique complexe qu’était la main, le pouce opposable qui était le propre des primates a la base. Mais ce savoir c’était étendu à d’autres créatures après la jonction. En tout cas, l’homme avait toujours fait partie de ses privilégier… Grace à ce système complexe donc, Onesime pouvait voir toutes les subtilités des milliers de facettes que comportait ce pommeau. Magnifique. Fascinant. Hypnotisant…
- Une sensation de déjà-vu.
Dit Onesime, tout à coup. Azel venait de rentrer dans la pièce.
Il n’avait pas été particulièrement bruyant, pas non plus particulièrement discret. Il s’était juste planté devant la porte qu’il venait de refermer derrière lui et attendait que son interlocuteur le remarque. C’était le salon de la demeure d’Honoré et ce dernier était aux prises avec un nouveau projet que le gouvernement lui avait demandé. Bref, donc pas là pour mater le jolie minois ou fessier de son cher cousin aux cheveux blonds et Azel n’en était que plus soulagé. Il s’avança vers les fauteuils, s’assit à côté de celui qu’occupait Onesime.
- J’ai… Une affaire pour vous maitre Nelson. Et je vous demande de prendre cette affaire en priorité.
- Je m’en doutais un peu. Vous vous ne seriez pas déplacé jusqu’ici juste pour prendre le thé avec moi. C’est regrettable d’ailleurs. J’aime bien afficher notre « amitié » au grand jour. Mais comme vous devez le savoir, je viens juste d’accepter une autre affaire…
- Qui prendra surement beaucoup de temps, je le sais. Mais il s’agit d’une requête importante.
- Pour vos affaires
- Pour mes affaires oui. Je l’admets.
Il y eut un silence, durant lequel Onesime continuait de regarder son pommeau. Après un moment, il posa celui-ci entre sa cuisse et l’accoudoir du fauteuil, la bloquant pour pas qu’elle glisse sur le sol et il se tourna vers Azel.
-Aller, dites. J’accepte. Je m’arrangerais pour refiler l’autre affaire.
Le jeune homme lui sourit, hochant doucement la tête, un air satisfait. Il tenait à la main une enveloppe qu’il tendit à Onesime et sur laquelle il y était écrit « affaire Oakwood »





***

Oakwood



Les Oakwood avaient toujours été très proche des Montberry. C’était aussi une famille de noble, riche, respecté et plutôt respectable dans son genre. En tout cas, ils avaient la réputation d’être particulièrement honorables, gentils, généreux et dévots. Ils étaient originaires de Gilingham, de ses environs et était probablement, comme leur nom l’indique, d’anciens pionniers. Bref, une origine modeste qu’ils ont voulu conserver au fil des générations par ce modeste nom et ce malgré leur rang acquit honorablement. Leurs fortunes étaient tel qu’ils eurent le privilège et le luxe de se délocaliser dans les citadelles au fil des années. Ils voulaient donner à leur blason l’image d’une ancienne famille qui bouge, qui suit les nouvelles, qui est à jour et rien de mieux que le système super développé des cybers pour se tenir à la page. D’un autre côté, fière de leur provenance, ils n’hésitent pas à organiser des soirées mondaines avec la crème du monde techno en exposant leurs armoiries, revêtant les illustres costumes de leurs ancêtres ou la dernière robe en vogue dans la mode technologue pour les jeunes filles de la famille. Bref, une famille modèle d’intégration et de tolérance entre classes technopolitaines. Si bien que cette famille passaient souvent aux informations pour on ne sait quel don aux pauvres enfants malades d’on ne sait quel pays obscure. Vous savez ? Ce genre de famille people sur les bords, desquelles on suit parfois les amourettes parce que se marier avec Lord Oakwood ou Lady Oakwood était un rêve pour tout un chacun ? Ou alors ce genre de famille ou, un jour, devant la télé on se demande « mais attends… Pourquoi ils sont célèbres eux ? De quel jeux télévisés inter-classiales ils sortent déjà ? Non … Je crois que l’un deux était dans la musique non ?... Chais plus. En tout cas, ils doivent être bourrés de thunes. »
Bref, vous avez saisit le topo.
Quoi qu’il en soit, cette famille était au centre de l’actualité people du moment. Il y avait eu un scandale qu’on décrivait comme tragique. Oh non, il n’y avait pas mort d’homme, il s’agissait plutôt d’enlèvement… Plus ou moins…
Klint Oakwood était décrit par les médias, à travers de nombreux témoignages de voisin ou d’amis proches, comme un homme qui était la fière descendance des Oakwood et en comportait toutes les caractéristique qui les définissaient, à savoir : gentils, généreux, à l’écoute des autres, toujours prêt à aider son prochains et tout le gratin de compliments qui venaient bien souvent automatiquement derrière le nom de Oakwood.
Il était plutôt bien bâtit, grand, blond, yeux vert, l’air avenant. A ce moment-là, il avait dans la trentaine et paraissait souvent à la télé accompagné de ses 2 enfants, dans ses bras, les serrant contre lui sous les flashes des appareils photographique plus ou moins moderne. Quand les journalistes arrivaient à l’intercepter à la sortie d’un immeuble quelconque pour lui soutirer quelques questions, il s’arrêtait pour répondre avec humilité.
-Je suis heureux d’avoir pu récupérer mes enfants. Ils sont aussi précieux que la prunelle de mes yeux. C’est la descendance Oakwood et je les élèverais seul s’il le faut !
- Que pensez-vous d’Agathe Abigaël Oakwood ? Êtes-vous en colère ?
-Je pense que je l’aime toujours et non, aucune colère.
-Allez-vous demandez le divorce monsieur Oakwood ?
Il y eut un silence, et il semblait sourire tristement
-Je crains que ce ne soit elle qui le demande en premier. Moi, je serais prêt à lui pardonner mais parfois, il faut prendre des décisions qui ne nous plaisent pas… Pour le bien des enfants. Ce divorce serait une tâche sur le nom de notre illustre famille, mais je suis prêt à l’assumer…
Il sembla hésiter un instant
- Personne n’est parfait.

Tribunal d'instance - 27 septembre 247

Le maillet du juge frappa 3 fois sur son socle, faisant résonner ce bruit sec dans toute la pièce. Il appelait à l’affaire suivante, l’affaire Oakwood. Onesime se tenait à côté de Klint Oakwood et Agathe Oakwood était quant à elle, entouré de deux policiers. Elle avait les mains menottées, jointe à l’avant, reposant sur ses cuisses cachées par une longue jupe blanche. Elle avait la peau halée, naturellement et qui faisait ressortir ses yeux bleus : un bleu intense qui captivait le regard. Plutôt jolie, mais un physique qui laissait entendre son caractère marqué : Le nez long, avec une légère bosse qui pourrait être disgracieuse mais qui avec son visage était harmonieux. Les sourcils plutôt épais, assez droits, incurvant légèrement vers le haut sur la fin et enfin ses lèvres étaient charnues, légèrement entrouvertes. Ses cheveux, longs, coulant, noirs étaient attachés et peignés négligemment, comme si elle venait de sortir du lit et qu’elle ne s’était pas donner la peine de s’arranger. Plusieurs mèches coulaient sur son dos et des épaules mais ça lui donnait des allures sauvages. Elle avait l’air aussi, quelque chose de femme de Minoris-Dystria. Cet air fier, un peu dur, ferme. Un charme qu’on ne retrouvait pas chez les autres femmes. Un charme particulier à ce continent-là. Et Onesime, qui n’était pas loin d’elle beugua sur celle-ci. Côte à côte, il n’y avait aucun doute possible : Ils venaient du même endroit. Enfin, plus ou moins. Onesime, lui, avait un teint bien moins foncé qu’elle. Lui venait plutôt du nord, près de Dystria et elle, du sud : Minoris-Dystria. Il resta un moment à la regarder. Il avait déjà vaguement vu quelques photos mais il n’avait pas vraiment tilté, en tout cas pas jusqu’à présent. Il avait lu aussi qu’elle venait de Minoris-Dystria mais là encore, le nom ne lui avait fait ni chaud ni froid.
Le juge parlait et Onesime n’avait pas entendu le début. De toute façon il savait très bien ce qu’il allait dire : lire les chefs d’accusations concernant leurs affaires, il secoua la tête, se reconcentra



- Vous êtes l’avocat de madame Oakwood, maitre Eliott. Procédez à…
- Je n’ai pas d’avocat.
Sa voix était claire, forte et sereine mais elle avait un fort accent lietanien. L’avocat, qui se trouvait à ses côtés fut pris de court et sursauta, ne s’attendant pas à ce qu’elle prenne la parole. Tous la regardèrent d’un air ahuri. Onesime prit la parole
- Oui votre honneur, c’est bien Maitre Eliott son avocat, Monsieur Oakwood lui a payé l’homme qui se tient à ses côtés et comme elle doit le savoir, elle n’a pas le droit de parler ici, mais son avocat le peut. à moins qu’elle ne souhaite en venir au tribunal correctionnel auquel cas, elle pourra se présenter sans avocat
Dit-il en riant, comme une bonne blague.
- C’est ce que je souhaite, oui. Il est hors de question que je prenne un avocat payé par mon mari.
- Silence madame
Dit le juge en frappant du maillet.
- Que proposez-vous Maitre Onesime ?
- J’aurais bien proposé l’hôpital psychiatrique, mais mon client ne lui souhaite pas. Pareil pour la prison…
Il soupira d’agacement. Trop de bonté, tue la bonté.
- Il demande juste un retrait de la garde des enfants ainsi que l’interdiction pour elle de les voir en dehors de structures adaptés, réglementés et bien entendu surveillés votre honneur.
- Je refuse ! Je veux un procès ! Un vrai !
- Silence Madame Oakwood ! (frappe à nouveau le maillet). Ceci nous mène donc au tribunal correctionnel. Affaire suivante !





Le soir même - Maison secondaire des Montberry, chez Honoré de Montberry, 8 pm

-Cette affaire me tourne au ridicule, vous vous en rendez-compte j’espère !
Onesime était remonté, en colère, très en colère. Il faisait les cents pas devant Klint, Honoré et Azel.
- Cette garce m’affronte, moi, Onesime T.J Nelson ! Elle est juste folle !!
Azel ne disait rien, regardait la bibliothèque d’un air distrait en lisant les titres inscrit sur les tranches des livres si bien rangés, Honoré regardait Onesime faire ses aller-retour et Klint, lui, avait une expression tout à fait neutre.
- Mais Onesime, pourquoi cet énervement ? On sait tous comment ça va finir…
- Rah, tais-toi Honoré. C’est humilient. Et ça fait très mauvaise pub. J’aurais l’air de quoi hein ? L’avocat sans cœur qui ratatine une pauvre garce sans défense, sans avocat, qui a une saloperie d’accent, donc qui ne maitrise pas beaucoup la langue dans laquelle elle est jugée. Putain ! Mais elle me fait chier cette garce !
Klint ne disait rien, toujours son expression neutre. Onesime s’arrêta, soupira. Oui, ça l’agaçait, vraiment. Après un moment de silence, Mr Oakwook inspira profondément en se redressant un peu
- Maitre Nelson, vous n’avez rien à vous reprocher. Je lui ai proposé de régler ça à l’amiable, puis je lui ai proposé de l’argent et enfin… l’avocat. J’ai tout essayé.
Onesime le regarda, puis, il reprit ses allers retours. Oui, il le savait et il savait déjà qu’il utiliserait ça aussi… La grande question qu’il se posait pourtant c’était de savoir qu’est-ce qu’elle avait comme argument pour oser se présenter sans l’aide d’un avocat … Face à lui ! Il y avait surement quelque chose, il ne savait pas trop quoi mais il pensait vraiment qu’elle préparait quelque chose et il n’aimait pas ça.
- Qu’est-ce que vous ne me dites pas Mr Oakwood ? Mh ?! Que nous avez-vous caché ? Une autre femme ? Drogues ? Jeux ? Vices sexuels ? Homosexualité ? Pédophilie ? Viol ?
Klint fit non de la tête, énergiquement
- Non, je vous assure, rien de tout ça… J’aime… Boire, c’est tout. J’aime beaucoup boire, je l’avoue, j’ai quelques défauts, personne n’est parfait… Même un Oakwood. Mais nous mettons un point d’honneur à rester transparent.
Onesime pouffa, se remit à marcher, les mains derrière le dos.
- Oui, nous aussi on est transparent…
Azel ne regardait toujours pas la scène mais ne lisait plus aucun titre. Il eut envie de rire mais força son expression à rester figé. Honoré, lui, semblait mal à l’aise et Klint regardait Onesime qui s’était installé à la fenêtre pour regarder la rue.