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 [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."

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Lowell Marvin

Lowell Marvin


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MessageSujet: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptyJeu 5 Nov - 22:16

Première Partie : Il la vit.

WildOak city. Un joli petit village, perdu au milieu de nulle part, dans les contrées lointaines de la Nouvelle-Thulé et qui n’avait rien à envier aux plus grands capitoles des plus grandes villes de ce monde.
En effet, c’était un endroit de passage, de commerce, d’échange. Un arrêt obligatoire pour les intrépides voyageurs friands d’aventure dans les grands espaces sauvages, des explorateurs en quête de nouvelles espèces animales à répertorier ou encore des hommes à la recherche de mines à exploiter. En somme, un endroit paradoxal où l'on passait, ou l'on rencontrait des gens qui voulaient rejoindre le nord ou le sud et qui pourtant jouissait d’un calme et d’une sérénité qu’on ne trouverait jamais dans les autres grands carrefours connus.

C’est dans ce contexte qu’on vécu et ont grandi des familles qui ont fait fortune sur ces terres au départ inoccupées. C’était le cas pour la famille Marvin.
Les Marvin s’étaient installés là depuis pas mal de temps déjà. Pour vous donner une idée, quatre ou cinq générations ont vu le jour dans ces collines et au fur et à mesure, leurs propriétés se sont étendues. Ils possédaient de vastes terrains qu’ils louaient à d’autres personnes qui souhaitaient construire. C’est ainsi qu’ils bâtirent, au même titre que d’autres, une petite fortune raisonnable qui aida grandement aux études des jeunes bambins Marvin.

Mais intéressons nous à un Marvin en particulier. Le dernier plus exactement : Lowell Marvin.
C’était un jeune homme tout ce qu’il y a de plus banal dans cette famille : assez grand, bien bâtit, une carrure assez imposante. Pas spécialement beau, le visage taillé, les cheveux bouclés et sombres… Un certain charme quand même.
Lowell n’échappait pas à ses particularités génétiques, à quelques choses près qu’il avait certains troubles du sommeil qui lui maquillaient le regard par de larges cernes noires marquant fortement le bas de ses yeux. Cela lui donnait un air assez patibulaire et perpétuellement endormi. Comme si ce jeune homme était profondément « je m’en foutiste », comme s’il n’aimait pas trop se prendre la tête et qu’il se laissait vivre à un rythme lent et sans intérêt.
Et bien plus qu’un air, son physique reflétait réellement ce qu’il était.

A WildOak city, qui n’est autre qu’un petit village aux allures de villes en pleine expansion, tout le monde connaissait tout le monde, et tout le monde connaissait Lowell et ses déboires :
Un Marvin dans le feu de la jeunesse et pourtant assez raisonnable. Ne s’intéressant que très peu à l’alcool et aux cigares, préférant à ses cours de chirurgie les parties de cartes qu’il improvisait avec ses camarades. Bref, rien de méchant. Il vivait sa vie sans trop d’émotions, la prenait comme elle venait et ne se plaignait que rarement.
On eut connu de lui quelques clashes, à cause de ses quelques sautes d’humeurs dues à un manque conséquent de sommeil. Mais là encore, c’était bien rare et Lowell n’était finalement rien d’autre qu’un garçon sans trop d’histoires.
Même pour ce qui est des amourettes, pour son âge, rien de bien particulier à reconsidérer : il était sorti avec quelques filles, avait connu quelques déceptions, avait déçu plus d’une… Il lui arrivait d’avoir des aventures d’un soir… Mais il n’était pas du genre lubrique et ne s’intéressait à la chose que par feeling, conséquence de rencontres faites au hasard ou tout simplement quand son corps de jeune homme le demandait…

Mais alors, me direz vous, pourquoi je me tue à faire la description d’un type blasé et tout à fait dans les normes de l’époque ? Et bien, parce que son histoire fut bouleversée un soir d’hiver. En 245.
Lowell avait eu une de ses rares crises de colère qui le faisait sortir de ses gongs. Il avait quitté la maison familiale en pleine nuit, à cause d’une dispute concernant ses études… jusque là rien d’épatant… Il avait rejoint son groupe d’ami, pour traîner, comme à son habitude. Ceux-ci avaient tout de suite compris par la mine boudeuse de Lowell que ce n’était pas trop son jour et s'ils l’emmenaient jouer aux cartes, le risque d’échec le mettrait plus en rogne encore. De toute façon, lorsque Lowell arriva dans le groupe, ceux-ci avaient déjà un autre projet en tête. Et que vous me croyez ou non, ce projet n’était pas du genre chaste.
Prenant la discussion en cours Lowell ne tarda pas à deviner quelles étaient leurs intentions et regarda de son habituel air blasé ses camarades s’exiter tout seuls sur place. Il soupira avec une lassitude certaine, comme s’il se plaçait au dessus de toutes ces bêtises adolescentes.

« Non sérieux Lowell ! Elle est super canon c’te fille !

- Les gars… Je suis franchement pas d’humeur là, soupirait-il en se laissant bousculer amicalement par un autre type du groupe. Si elle est si mignonne que ça, va la draguer toi. »

Il y eut un éclat de rire général.

« Pas b’soin de la draguer Lowell !! C’est ça que t’as pas compris vieux !

Il se rapprocha de Lowell, passa son bras sur ses larges épaules pour parler plus bas. Les autres l’imitèrent, franche camaraderie et regards pétillants de malice.

« La jeune minette en question offre son joli p’tit corps aux formes généreuses (il dessina des courbes dans le vide)… Pour un prix…
Lowell le regarda d’un air exaspéré

- ça a un nom je te signale : prostituée. (Ses amis gloussèrent) Et ce n’est ni la première ni la dernière que vous allez voir ici… Et je parie qu’elle est à l’endroit où elle doit être, c'est-à-dire, dans la maison close d’Wild’O. (Les autres gars commencèrent à emmener Lowell) Donc y a rien d’extraordinaire, une meuf qui vend son corps parce qu’elle sait rien faire d’autre (il se laissa faire), c’est plus que banal. En plus on en a vu d’autres non ? On a même déjà testé alors qu’est ce que ce qu’elle a d’aussi extraordinaire hein ? (Il suivait à présent à pas assez pressé, la joyeuse compagnie qui se dirigeait à présent vers la maison close) Et puis …
- Roh putain Lowell, ferme la, tu verras, ça en vaut le détour et tu seras pas déçu quoi !
- Tsss … Mais attendez, pourquoi vous voulez absolument me la montrer hein ?
- On t’expliquera après putain !

Ils trottèrent donc jusqu’à l’endroit en question et passèrent cette porte qu’ils ne poussaient pas pour la première fois (Lowell y comprit). Ce lieu, clos, chauffé au maximum à cette période de l’année ressemblait beaucoup à un bar, très convivial, très animé. Les hommes riaient, buvaient et fumaient. Mais évidement LA différence, c’est qu’il y avait, entre tous ces hommes, des femmes aux gestes chaleureux et décontractés, jouant avec ces messieurs, incitant à consommer.
Le but du jeu était simple : on passait un bon moment, entouré de plein de femmes et lorsqu’on avait notre « favorite », on lui susurrait à l’oreille quelques mots ce à quoi elle répondait par un autre murmure (en général le prix) et on montait à l’étage où se trouvaient des chambres plus intimes et confortables. La disparition d’un homme et d’une femme dans la soirée ne se faisait pas trop remarquer et tout allait assez naturellement.

Ainsi donc Lowell et sa troupe de jeunes débauchés s’engouffrèrent dans la moiteur chaude du lieu, prirent place autour d’une table assez basse s’affalant dans des fauteuils bien ornés. L’ambiance de la salle ne tarda pas à les mettre dans le bain et les femmes qui venaient accueillir les nouveaux venus leurs servaient déjà de bonnes pintes de bières fraîches qu’ils avalèrent à grande gorgées, comme le faisaient les VRAIS hommes. On rit, on joua, on blagua, piques et pointes par-ci, répartie sanglante par là.
L’humeur de Lowell s’était un peu améliorée, ou du moins c’est ce qu’il laissait croire. En réalité il se laissait aller, essayait de ne pas penser au sujet qui l’avait mis en colère pour ne pas plomber l’ambiance. La petite nouvelle avait certes piqué sa curiosité mais sans plus. C’était juste une excuse pour suivre le monde. Il s’imaginait déjà dans les bras d’une de ses femmes dans une de ses chambres à expier toutes ses pensées négatives. Il savait comment ça fonctionnait et ne se doutait pas le moins du monde qu’en fait ce soir là, il n’aurait plus jamais envie de coucher avec n’importe quelle fille prise au hasard pour une satisfaction si animale…
Non … Tout changea en une fraction de seconde.
Tout l’engrenage d’un bouleversement intense chez ce jeune garçon commença en un bref instant. Juste le temps d’un coup d’œil.
Un coup d’œil précédé par un éclat de rire cristallin qui dirigea instinctivement les yeux noirs et cernés de Lowell. Ce rire avait attiré tout de suite son ouï fine. Juste beau. Que dis-je, parfait. Celle qui devait avoir ri de cette manière ne pouvait être qu’une personne franche.
C’est alors que l’image d’une jeune femme éclatante de vie et de joie apparue devant lui.

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." Scne2

C’était elle.
C’était la nouvelle.
Hypnotisé, sidéré, happé, envoûté. Lowell en perdit la voix, resta presque bouché bée, contemplant la belle. On ne tarda pas à s’apercevoir de la découverte de Lowell et on sourit jusqu’aux oreilles le laissant quelques instants encore dans son ébahissement quand enfin une main se posa sur son épaule, le ramenant sur terre.

« Eh oui… C’est elle… La petite nouvelle. En fait, toi tu pourrais de la payer, parce que t’es friqué… Mais bon, comme il est dommage de gâcher une si belle perle juste pour une partie de jambe en l’air, et que je suis sûr que tu penses la même chose, on s’est tous mis en tête de séduire mademoiselle sous nos yeux et devine quoi ?

Lowell resta silencieux, écoutant attentivement, comme si tout au sujet de la jeune prostituée l’intéressait soudain.

« Oui ? Quoi ?! proclama t-il en n’entendant aucune réponse
- Eh ben on a tous essayé et on s’est tous pris des râteaux.
- Ouais ben faut être lucide non ? Elle va pas abandonner son poste rien que pour un gars qui serait venu lui faire la sérénade. Bien payé et je suis sûr que vous avez pas été les seuls à avoir tenté votre chance.
- Ça tu l’as dit Low. Elle a envoyé bouler tous les hommes qui lui ont demandé la main. Et apparemment ce n’est même pas une question d’argent.
Lowell soupira. Il y pensait bien que ce n’était pas qu’une simple question d’argent. A moins qu’elle fasse monter les enchères. Cette pensée fit rire le jeune homme.

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." Scne1

« Ouais Ok, j’avoue, elle est plus que mignonne …
L’autre gars le regarda d’un air interrogatif
« Oui, oui elle me plait … Beaucoup. D’accord, j’avoue. Mais qu’est ce que tu veux que je fasse hein ? Que je me prenne un râteau monumental comme vous tous ? Si tu veux, allez. J’ai rien à perdre de toute façon.
- Bah non. Tu fais c’que tu veux, vieux. On voulait juste te présenter la belle en question.
Lowell regarda son ami dans le coin de l’œil. Ça semblait louche tout ça. Il savait qu’il y avait quelque chose qu’ils mijotaient. Mais à vrai dire il s’en foutait un peu, reporta ses yeux sur la créature tant convoitée.

« Comment elle s’appelle ?

Son ami eut à nouveau un sourire goguenard se redressa et s’approcha du jeune Marvin .

« Abel. Ici son nom c’est Abel La Belle*.

- Ouais et son nom de famille ?

L’autre le regarda avec des yeux ronds.

- Son nom de famille ? Pourquoi tu veux savoir ça toi ? On s’en fout, c’est une prostituée. Elle n’a pas de nom de famille.
- Bien sûr qu’elle en a un. Je veux le connaître. Parce qu’il est difficile de changer un nom si on ne le connaît pas. Et si elle n'en a vraiment pas, alors je lui en donnerais un.


[* Ils parlent le Tikhvine et "La Belle" reste en Astarnaïa ]
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Lowell Marvin

Lowell Marvin


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MessageSujet: Re: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptyDim 8 Nov - 21:01

Deuxième partie : Il lui parla

Ce jour là, il neigeait doucement dehors. Et il faisait un de ces froids meurtriers qui vous prennent au dépourvu alors que vous pensiez qu’il ferait beau. Un de ces jours où, en vous levant le matin, quand vous regardez le ciel par votre fenêtre vous ne jugez pas indispensable de prendre un de ces gros manteaux encombrants. Un de ces jours où vous maudissez ce jugement trop hâtif en frissonnant sous un porche pour vous abriter de la neige.
Celui qui commet cette erreur à Wild’Oak City est soit un nouveau, soit un sot.
Ce jour là, pour Lowell, ce fut de la pure sottise. Il avait été beaucoup trop distrait, beaucoup trop pressé, un tantinet soit peu impatient. Il susurrait des jurons en accusant son esprit volage tout en frottant ses mains gantées l’une contre l’autre. Encore heureux qu’elles le fussent.

Il se trouvait juste devant la porte arrière de la maison close, attendant là depuis une bonne demi-heure. Il savait qu’il n’allait plus tarder à voir son attente récompensée, ce n’était l’affaire que de quelques minutes encore…

Enfin, la porte s’ouvrit. Comme s’il s’agissait d’un appel qui lui était destiné, Lowell leva les yeux. L’attente ne faisait qu’accroître la joie qu’il avait de la voir. Il la regarda longuement, sans rien dire, admirant son doux visage, ses yeux dans lesquels on pourrait sombrer, les lignes qui dessinaient ses fines lèvres roses et si désirables, ses cheveux qui lui tombaient en cascade sur des épaules recouvertes d’un léger châle.
Abel La Belle toisa le jeune homme pendant un bref instant, le reconnu vaguement et sourit comme à son habitude trouvant sûrement celui-ci un peu ridicule dans son mutisme.

- C’est vous qui m’aviez demandée ? demanda t-elle d’une voix qui fit tressaillir, bien malgré lui, le jeune homme ébahi.
- Oui, oui, c’est bien moi.
- Vous êtes Lowell … Lowell Marvin n’est ce pas ?» Elle avait un accent qui ne venait pas d’ici. Et cette tonalité de voix si particulière lui fit entrevoir de beaux et lointains horizons. De plus, il fut enchanté de voir qu’elle le connaissait de nom.
« D’habitude… On entre à l’intérieur vous savez ? Vous connaissez le jeu non ?
- Je le connais oui. Je n’y suis pas étranger.
- Alors… Que faites vous dehors ? Si vous voulez me voir, il est préférable d’entrer.
- Je le conçois. Mais ce n’est pas « ça » que je veux. »

Abel resta muette un instant, puis relâcha les épaules en inclinant la tête d’un air las.
Il s’y était attendu et eut un petit sourire en voyant la jeune prostituée soupirer. Aller ! Encore un ! Finissons-en vite. Elle se redressa, prit une grande inspiration et :

« Je vois… Et bien je suis dans le regret de vous annoncer que c’est non, qu’il y a pas moyen, peu importe le prix, peu importe les conditions. Pas la peine de vous mettre à genoux, vous ne feriez que vous salir. Pas la peine non plus de me sortir un poème, ou une sérénade ou je ne sais quoi d’autre… Je tiens à ma liberté et j’en jouis parfaitement. Non, je ne suis pas malheureuse dans le métier que j’exerce et je suis loin d’être une de ces filles que l’on force à accomplir ce genre de tâche. Si vous voulez le savoir, j’aime les hommes, peut-être un peu trop au goût de certains et non, je ne suis PAS lesbienne.
Je vous annonce donc, clairement, que vous venez de vous prendre un râteau et je tiens à signaler que ce n’est absolument pas une manière de me faire désirer. Voilà. »

Elle avait prononcé son petit speech d’une voix monotone, comme si elle récitait un texte apprit par cœur, dit et redit on ne sait combien de fois et dont on s’était très largement lassé. Elle avait néanmoins insisté sur un mot, ce qui laissait croire que quelques autres prétendants frustrés avaient émis des hypothèses douteuses sur son orientation sexuelle.
Lowell avait déjà entendu parler de son mordant naturel. Il s’était renseigné avant de passer à l’action et il écoutait la jeune fille avec un sourire qui semblait s’élargir au fur et à mesure. Ce qui dérouta un tant soit peu Abel. Elle le regardait à présent en fronçant légèrement les sourcils, essayant de distinguer ce qui était amusant dans ses paroles.

« Eh bien, vous m’en voyez ravi mademoiselle. Voyez-vous, vous venez de confirmer que la mémoire de l’un de mes amis est d’une excellence rare. Vous l’avez blessé. Comme beaucoup d’autres hommes d’ailleurs. Un en particulier notamment : celui qui a juré que vous étiez lesbienne.

- Que voulez vous, on ne peut pas être gentille avec tout le monde. Mais là je ne vous suis pas… Vous n’êtes pas ici pour me demander ma main ?
Lowell fit mine de réfléchir en levant les yeux au ciel.
- J’en sais rien… Qu’en pensez-vous ? Vous m’épouseriez ?
- Non. Vous n’êtes pas mon type, répondit-elle du tac au tac.
Lowell éclata de rire.
- Vous avez décidément beaucoup de culot.
- Assez pour me défendre je dirais. Mais que voulez vous ? Si vous ne l’avez pas remarqué, il fait assez froid et je ne suis pas franchement habillée pour rester plus longtemps à papoter dehors.
Son ton s’irritait légèrement, comme si cette discussion s’éternisait un peu trop à son goût. Elle resserra légèrement son châle. En effet, elle n’était habillé que d’une robe et ne portait absolument rien pour couvrir ses bras et son cou, si ce n’est que le petit pan de tissu dans lequel elle s’enveloppait tant bien que mal.
« C’est dommage parce que nous allons dehors. Je vous en prie, allez vous couvrir comme il se doit, je vous attends ici. »

Abel prit un air abasourdit.

« Et en quel honneur ? reprit elle d’une voix cinglante
- Parce que j’ai payé.
- Payé ? Personne ne m’a mis au courant.
- Oh, probablement que oui. Vous attendiez un client non ? Eh bien me voici.
- Et c’est vous mon client ?
- Moi-même.
Elle regarda rapidement le ciel. Il neigeait à petits flocons et il faisait vraiment très frais.
- Et vous voulez aller dehors ?
- C’est cela. »
La prostituée soupira légèrement. Il lui arrivait que certains clients préférant se retrouver dans un lieu plus intime encore que les chambres proposées à l’étage lui demandent de venir jusqu’à leur domicile. Mais dans ces cas-là, on lui faisait la commission, lui indiquait où se trouvait le lieu en question et elle s’y rendait en toute discrétion. Ce jeune homme-là devait être fichtrement idiot ou complètement ignorant. Mais il avait payé. Elle se devait donc d’exécuter le moindre de ses désirs. Elle ferma la porte sans rien ajouter.
Ce ne fut qu’une dizaine de minutes plus tard qu’elle revint, habillée plus chaudement, avec un large manteau à capuche, des gants et bien entendu, des bottes.
Elle fut à nouveau accueillie par le sourire amusé du Marvin et par un bras l’invitant à marcher du même pas que son client. Elle hésita un instant, le regarda avec un air pas franchement rassuré. Ce genre de geste lui semblait un peu trop galant. C’était une prostituée, pas une amie, ou une dame plus âgée ou plus importante… Juste une prostituée.

« Eh bien ?! » s’impatienta le fougueux Lowell.
Elle fut donc prise au dépourvue, passa prestement son bras par dessous le sien et fut alors entraînée dans la rue enneigée. Elle ne s’en était pas rendu compte au départ, mais le jeune Marvin possédait vraiment une force physique assez étonnante. Sa réputation n’était donc pas fausse et elle se surprit à se dire que son corps aussi devait être bien formé. De toute façon, elle le saurait bien assez vite pensait-elle.
Et ils marchèrent côte à côte, pendant un bon moment. Un long, très long moment même … Et cela commençaient à s’éterniser. Et des questions surgirent dans son esprit curieux … S’il habitait si loin, pourquoi n’était-il pas resté à la maison close ? Il gaspillait inutilement de son temps là non ? Il était vraiment stupide ce garçon…
Leur balade s’était effectuée dans un silence presque effrayant. Pour elle du moins. Elle n’était vraiment pas habituée à cela. Le jeune garçon qui semblait d’un premier abord assez jovial et enthousiaste s’était transformé en homme serein et calme, contemplant le paysage qui défilait sous ses yeux avec un léger sourire satisfait au coin des lèvres.
Abel qui passait de surprise en surprise se dit qu’il lui vaudrait mieux se concentrer sur ce qui adviendrait après, se préparant mentalement, revoyant ses gestes, révisant son attitude… Puis, quand elle eut fini ses révisions et que le trajet, lui, n’en finissait pas, elle se mit à laisser aller son esprit à mille et une choses. Elle se perdit donc dans ses pensées et se laissa entraîner par Lowell sur des chemins divers et variés.
Quelle ne fut pas sa surprise quand tout à coup, le jeune homme ralentit puis s’arrêta. Abel revint à elle-même et s’aperçut que… Ils étaient revenus devant la porte arrière de la maison close. Elle leva des yeux stupéfaits vers Lowell, ne trouvant pas grand-chose à dire devant son sourire très amusé.

« Eh bien, vous me semblez bien surprise Mademoiselle Abel. Le temps est écoulé et comme je suis honnête, je ne consomme que ce que je paye, sans déborder sur l’horaire. »

Pour le coup, c’était Abel qui était scotchée. Il n’avait rien « consommé » du tout ! C’était absurde ! Ils n’avaient fait que marcher… Pour revenir au point de départ.
Lowell n’attendit pas sa réponse, la salua en s’inclinant légèrement.

« Ce fut un plaisir. J’espère que vous accepterez de me revoir une prochaine fois… »

Il sourit, fit demi-tour et partit laissant une Abel complètement étourdie par la singularité du jeune homme. Elle reprit pied en secouant la tête. Il n’y avait pas de doute possible, ce gars était un abruti.

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." Retrobebellowy001copie

Elle entra, au grand étonnement de toutes, à l’heure à laquelle elle se devait de rentrer. Elle raconta son aventure, on rit, on supposa… Peut-être s’était il finalement dégonflé, qu’il n’avait rien trouvé à dire, qu’en fait le râteau qu’il s’était prit l’avait refroidi. Qui sait, il avait peut-être honte de sa physionomie… Non… D’autres filles le connaissaient et avaient déjà couché avec lui. Il n’avait absolument pas à avoir honte de quoi que ce soit, en plus, il n’était pas un ignorant sur la chose. Néanmoins, il en ressortit qu’il y avait de fortes chances pour qu’il ne la demande plus.
Abel, ne demandait que ça. C’était un peu trop déroutant pour elle et elle finit par conclure qu’elle le trouvait vraiment idiot. Elle se retira et se prépara pour ses autres clients.
Tout en se déshabillant, elle ne pouvait pas s’empêcher de se demander quel était le but de cette promenade forcée, ce qui la mit d’autant plus mal à l’aise car elle ne trouvait pas de réponse convenable. Elle était convaincue qu’il y avait quelque chose sous tout cela. Qui sait, peut être voulait-il se faire languir lui-même ? A défaut de n’avoir aucune chance pour ce qui est d’une intrigue amoureuse qui faisait tant chavirer le cœur des gens de leurs âges, il voulait peut être s’imposer une sorte d’attente, de restriction qui l’enflammerait d’avantage au moment suprême où il s’autoriserait enfin de consommer la chair ? Peut-être voulait-il la mettre assez en confiance pour lui sauter dessus au moment propice, comme un loup qui aurait traqué sa proie pendant de longues heures, tapi, l’air de rien sur le sol et faisant mine de n’être qu’un docile agneau ?
Elle sourit. Elle ne se laisserait pas avoir par ces loups cachottiers. C’étaient les plus dangereux mais elle savait les débusquer…
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Lowell Marvin

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MessageSujet: Re: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptyVen 13 Nov - 19:05

Troisième partie : Il fit sa connaissance


Abel n’y croyait qu’à moitié.
Et pourtant, Lowell revint, deux jours plus tard. Puis encore une fois. Et une troisième.
Toutes ses visites étaient espacées de quelques jours … Deux, trois, quatre. Cela dépendait beaucoup du temps en fait. Et toutes ses visites se passaient de la même manière : ils marchaient, côte à côte, pendant toute la durée qu’ils s’autorisaient. Toujours pile à l’heure : que ce soit pour prendre Abel ou pour la laisser à la maison close.
Pour ce qui est du trajet, la jeune femme ne s’en rendait pas trop compte en fait, mais il lui semblait qu’ils prenaient toujours un chemin différent comme si, quelque part, Lowell lui faisait visiter les environs de Wild’Oak city. Dans les premiers jours, elle voulait lui demander quelque chose du genre : « Mais où allons nous à la fin ?! » mais elle n’osa pas et, plus tard, il lui semblait entendre la réponse non formulée pour sa question non prononcée, comme si elle avait était dite par son guide : « A-t-on vraiment besoin d’aller quelque part ? » comme si c'était une évidence.

Au départ, elle restait prudente et s’attendait à chaque instant à ce que son étrange client change d’avis et qu’il l’entraîne dans un endroit où elle pourrait exercer les vraies compétences pour lesquelles on la payait. Mais non, cela n’arriva pas et cela ne semblait pas du tout être dans les intentions de Lowell.
Elle finit donc par se relâcher, se détendre, s’habituer. Elle en venait à anticiper ses venues, puis à les attendre, enfin à les espérer. C’était pour elle comme un rituel, une pause, une trêve. Un retour aux sources, un bol d’air frai,s de quoi se changer les idées.
Pour finir, le silence qu’elle trouvait toujours un peu dérangeant (même si celui-ci possédait un certain charme apaisant) finit part laisser place à de longues discussions.
Au départ hésitante, elle s’aventura à lui poser quelques questions, entamer un semblant de dialogue et s’aperçut bien assez vite que le jeune homme ne voyait aucun inconvénient à parlementer avec elle, même sur des sujets des plus banals. Justement même, il semblait n’attendre que ça mais laissait à Abel tout le loisir de faire le premier pas.
Ils discutèrent donc, de choses et d’autres. Ce qu’ils aimaient, ce qu’ils détestaient, ce qu’ils avaient trouvé drôle ou pitoyable, les dernières nouvelles, leurs amours, leurs aventures, leurs voyages, leurs origines, leurs enfances, leurs souvenirs…
Elle se confia à lui. Lui, qui n’avait pas grand-chose à dire, l’écoutait beaucoup.
Ils se connurent très bien ainsi. Chacun connaissait l’autre plus que n’importe quelle autre personne à Wild’Oak city.
Tout semblait si naturel !
Petit à petit, Abel et Lowell devinrent plus familiers, oublièrent les formules d’usages, laissèrent à l’abandon les vouvoiements.

Quand ils étaient ensemble, Abel avait l’impression que sa vie, la maison close, les passants, le village disparaissait pour laisser place à leur balade. Elle se perdait avec enthousiasme dans l’oubli de tout… Tout sauf lui, sa voix grave, ses manières galantes et attentionnées. Elle l’avait bien compris, depuis un bon moment, sûrement depuis leur première rencontre : elle savait que Lowell était amoureux d’elle, mais au départ elle s’en méfiait et s’en trouvait mal à l’aise. A présent, cela avait changé : cette pensée lui était bien douce. Elle se surprenait à espérer qu’il l’aimât encore plus et redoutait que son amour ne faiblisse.
Bien que ce fut faux, elle trouvait que le temps qu’il lui accordait était de plus en plus court. En fait, le temps imparti était exactement le même qu’au départ mais pour Abel, ce temps ne lui suffisait plus. Alors elle ralentissait le pas, pour faire durer la randonnée. Ce qui n’échappa pas à l’attention toute particulière que Lowell lui portait et il en fut secrètement ravi.
Mais, même si celui-ci accordait qu’on ralentisse l’allure pour en allonger la durée, l’arrivée finale restait indéniablement la porte arrière de la maison close.
Quoi qu’il advenait, c’était toujours là que finissait leurs marches, peu importe de combien on repoussait l’échéance, le résultat final se trouvait là et Abel en venait à déplorer ce retour.
A chaque fois qu’ils se dirigeaient à nouveau vers ce point là, sa gorge se nouait, son ventre se crispait, sa mâchoire se resserrait.

Une fois seule, elle passait de long moment à se demander comment aurait été sa vie si il en avait été autrement…Mais ne partageait pas sa pensée profonde.
Par fierté, quand quelqu’un lui demandait ce qu’elle faisait encore là, qu’est ce qu’elle attendait pour partir de ce merdier, elle répondait :
« J’aime les hommes et j’aime ma liberté. »
Quand on parlait de Lowell devant elle pour répondre à ce genre de discours, elle adoptait toujours un air hautain en proclament haut et fort qu’il ne l’intéressait pas. Puis elle se ravisait parce que cette phrase sonnait incroyablement faux :
« Bon, d’accord, je l’avoue, il me plait », mais elle rajoutait : « c’est pas pour autant que je vais renoncer à ma vie pour lui ! Pas pour UN homme ! » Et à ses mots son cœur se serrait.
En réalité, cette vie de « liberté » commençait à la lasser. Elle voyait beaucoup d’hommes, mais au final, c’était tous les mêmes. Ils venaient tous là pour consommer parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix, ou par lubricité, ou par perversion. Et finalement, Abel se disait de plus en plus qu’en fait ces hommes ne couchaient pas avec elle, mais avec une femme parmi d’autres, choisie par critère de préférence. Elle avait l’impression de n’être que de la viande de qualité que l’on mange que parce que l’on est affamé.
Quelle vie… Quelle liberté…
Non, il n’y avait plus vraiment de liberté à ses yeux. Cette formule était passée, vieillie, plus d’usage. Les vérités changent avec le temps.
Et puis elle se mit à douter : était-ce vraiment une vérité par le passé ? Est-ce que ce n’était pas une illusion de jeune fille qui voulait aller à l’encontre des bonnes mœurs parce que ça faisait trop sage de les suivre, trop banal, trop comme tout le monde…
« J’aime les hommes… » Quelle phrase idiote. Bien sûr, elle aimait le genre humain. Bien sûr, elle préférait le corps d’un homme (à celui d’une femme)… Mais est-ce que secrètement elle ne cherchait pas L’homme, le seul, l’unique ? Finalement, elle n’avait jamais cessé de croire au « prince charmant ».

Quoi qu’il en soit, elle se retrouvait dès lors face aux faits et ouvrit les yeux sur la réalité de sa vie : son « métier » ne lui convenait plus. Elle le trouvait futile, sans retour, en aucun cas constructif et qui plus est, de moins en moins glorifiant pour sa personne. Mais il lui rapportait de quoi vivre.
Voilà la question qui trottait alors dans son esprit : survie.
Et pourquoi pas changer de métier ? Oui… Mais quoi ? Elle avait quitté l’école bien trop tôt, n’avait aucune chance d’avoir un diplôme quelconque. De toute façon il fallait être doué pour quelque chose pour suivre des études non ? Ou du moins être passionné par quelque chose. Comme Lowell avec sa chirurgie. Mais elle ne connaissait rien de particulier, n’avait pas de passion pour une filière.
Résultat, elle devait céder son corps, contre de l’argent. C’était tout ce qu’elle savait faire. C’était une prostituée.
Alors, se résignant à changer sa condition, elle s’offrait à celui qui la payait, laissant parler les désirs de ces hommes qu’elle disait tant aimer.
Et de ces hommes, elle n’en voulait plus… Overdose.
Enfin… Elle n’en voulait plus… Si. Elle en voulait. Elle en voulait UN.
Elle voulait celui avec qui elle s’entendait si bien, celui qui lui parlait pendant de longues heures, celui qui l’écoutait, qui la faisait rire, qui l’étonnait toujours.
Celui qui ne consommait pas ce qu’il payait et qui l’emmenait juste se promener.
Elle ne voulait que Lowell.
Elle le désirait et elle désirait qu’il la prenne dans ses bras, qu’à sa manière, il l’embrassât. Comment embrassait-il ? Elle ne le savait pas. Elle était restée dans l’ignorance la plus totale. Pendant tout ce temps… 6 longs mois.
S’apercevant de toutes ces petites choses, Abel finit par se frustrer et à présent, elle voulait que les choses changent. Mais rien.
Pas l’ombre d’un changement à l’horizon. Pourquoi elle ne le lui disait pas ? Toujours par fierté ? … Non, à présent c’était la peur. La peur de devoir parler, d’avouer qu’elle s’était trompée. La peur d’être rejetée comme elle l’avait fait il y a longtemps pour Lowell.
S'il l’aimait, pourquoi le laissait-elle encore vendre son corps ? Elle ne comprenait pas.

Quoi qu’il en soit, à la fin de chacune de ses longues balades où elle oubliait tout, elle revenait sur terre, redevenait Abel La Belle.
Que de frustration et de désenchantement.
Elle devait faire beaucoup d’efforts pour continuer à faire son travail convenablement. Tout lui semblait morne, terne, sans vie quand on la mettait sur le dos. Elle sombrait dans un ennui et une lassitude à faire peur. Dans ces moments-là, elle repensait au bon air frais de l’extérieur, aux discutions interminables… A Lowell.
Alors, son esprit très imaginatif transformait l’homme qui l’écrasait de tout son poids. Elle fermait juste les yeux, se laissait faire, et s’imaginait que c'était Lowell qui prenait la place de son client.

[ pas d'image :/ je sais vraiment pas quoi dessiner pour le coup :'D ]
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Lowell Marvin

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MessageSujet: Re: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptyMar 17 Nov - 22:19

Quatrième partie : Il joua


Et l’autre dans tout ça ? Qu’en était-il pour Marvin ?
Je vais vous le dire : pour Lowell, l’affaire était perçue tout autrement. On peut dire qu’il ne chômait pas. En effet, il jonglait sans cesse entre ses études, les problèmes familiaux et Abel.
Dès le départ, il s’était mis en tête d’épouser la prostituée et plus le temps passait plus l’envie de lui passer la bague au doigt augmentait et ce pour plusieurs raisons :
Premièrement, c’est la plus évidente, il l’aimait à en perdre la tête… Plus encore qu’au premier regard. Il la connaissait maintenant, il la connaissait très bien même et il la trouvait d’autant plus aimable : qualités comme défauts, il prenait tout volontiers. Il voulait que ce soit elle qui soit présente dans sa vie et personne d’autre. Quel homme borné et têtu !
Deuxièmement, raison évidente aussi, il ne supportait plus de la voir dans la maison close. En l’épousant, il libérerait la belle de cette prison de débauche et de fornication.
A cause d’Abel, il s’était mis à dos bon nombre de ses ex-amis qui avait fait le sacrilège de goûter à la grâce de ses chairs. C’était des menaces, puis par un excès de colère des bagarres … Et il valait mieux ne pas se battre avec Lowell, croyez moi.
D’ailleurs, au village, on ne reconnaissait plus le gentil Lowell sans histoire. Il avait endossé la réputation de gars assez violent, près à sortir les crocs dès qu’il s’agissait de la prostituée avec qui il traînait. Ainsi, beaucoup de monde montrait le jeune Marvin du doigt.

Vous pouvez vous imaginer que dans la famille aussi ça jasait !
Marvin père, s’était mis dans une de ses colères monstres quand il apprit que son entêté de fils voulait épouser une prostituée. Une colère d’autant plus grande qu’en fait, un mariage d’intérêt était prévu bien avant que le jeune Lowell ne sache marcher. On cria au scandale, à la honte de la famille, à la renommer de ses pères bafoués, aux glorieux prestiges perdus …
« Tu n’as donc aucune considération pour tes parents ?! » ou … « Fils indigne ! Tu nous fais honte ! » Étaient de ses phrases qui revenait bien souvent.
Mais Lowell tenait tête. Lui aussi haussait la voix. Il s’imposait face à ses parents qui ne purent dissuader leur fils.
Ainsi, le mariage arrangé fut annulé. De toute façon, l’autre famille, ayant apprit ce qui se disait à Wild’Oak city à propos du gendre, voyait l’union d’un très mauvais œil et s’empressa de confirmer l’annulation… Comme l’avait prévu Lowell.
Le temps passa, calmant les ardeurs. Marvin père ne voulait plus rien à voir avec son fils. Mais celui-ci n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Il allait le voir tout les jours, harcelant son vieux pour qu’il accepte son mariage. Dans un premier temps, le vieil homme se renfrognait dans une négation la plus totale. Puis petit à petit, on commença à argumenter, à essayer de convaincre … Puis dissuader. Lowell ne cédait toujours pas. On en vint à parler de la dot.
« Tu crois que c’est qui qui va la payer c’te dot hein ?! ».
Pour Lowell, c’était bon signe. Même si se fut les derniers retranchement de la famille pour tenter de faire un sorte que le mariage n’eut pas lieu : ils auraient pu tout simplement accorder qu’il n’y ait pas de dot, mais cela aurait été trop facile ! Ils en voulaient une, et Lowell savait qu’ils ne dérogeraient pas sur se point. Néanmoins, parler de la dot s’était un peu comme envisager les préparatifs d’un mariage prochain. Il avait enfin les cartes en mains. Alors, à cette question, le jeune homme sourit.
« Ah ça … »
Et l’affaire fut résolue, en peu de temps et d’une manière tout à fait originale … Pour ne pas dire absurde :

En fait, des paris avaient commencés bien avant qu’il ne fasse la connaissance de La Belle et notre malicieux Lowell s’était douté que ses camarades allaient tous parier. Il l’avait sût dès le début parce que c’était LA bonne occasion de jouer et faire tourner de jolis petits billets… Beaucoup de gars avaient misés sur eux même et le pactole s’était quelque peu engraissé au fil du temps.
Quand Lowell est entré en jeu, on y croyait pas trop, alors pas mal de gars avaient pariés que Lowell se prendrait un râteau (ce qui fut le cas, mais personne ne le sût vraiment vu la tournure des choses).
Au fur et à mesure que celui-ci persistait, les joueurs suivaient l’affaire avec intérêt. On essayait de mettre des bâtons dans les roues du jeune amoureux en allant coucher avec La Belle et s’en venter près de lui qui était resté chaste (ceux-ci en ressortaient défigurés comme je l’ai dis plus tôt). Bref, tout ça pour vous dire qu’il y avait emmagasiné une petite fortune et que Lowell comptait bien s’approprier ce qui lui revenait de droit… Oui, Lowell était sur d’avoir réussi et vendait déjà la peau de l’ours avant de l’avoir tué.
Un soir donc, il entra in extrémiste à l’intérieur du bar QG où il avait l’habitude de traîner. C’était là que le « croupier » du jeu s’était installé. Que ne fut pas sa surprise en le voyant débarquer de son grand pas assuré, sa carrure imposante et un air de ne pas être là pour plaisanter … Lowell s’arrêta net devant la table à laquelle était assis le maître des paris qui avait levés les yeux d’un air pas rassuré.
« Si je vous dis que je vais épouser Abel, l’argent me revient de droit n’est ce pas ? » dit il avec un large sourire qui faisait fichtrement peur par la menace qu’il cachait.
Le croupier balaya son regard cherchant une réponse convenable à fournir sous la pression d’un Marvin aux crocs acérés.
« Lowell … Tu sais comment ça marche non ? … Ce n’est pas aussi simple que çaaaaaa …. »

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." Lowyetlecroupier001

Celui-ci se retrouva à quelques centimètres du visage de Lowell, soulevé par le col, la pointe des pieds effleurant le sol avec difficulté. L’insomniaque avait figé son sourire et son regard s’était obscurci d’une manière tout à fait impressionnante.
« Je suis sur que c’est beaucoup moins compliqué que ça n’y parait, t’es pas d’accord ? »
Il ne pu que balancer frénétiquement de la tête d’une façon tout à fait ridicule avant d’être brutalement relâché par terre.
Lowell n’attendit pas son reste, tourna les talons et se prépara à partir quand une voix, celle de l’un de ce qui jouait aux cartes avec le croupier, s’éleva, interpellant Lowell qui s’arrêta juste devant la porte. Il savait déjà ce qui aller se dire.
« Lowell! Faut jouer Fairplay… Tu mises et si Abel consent à t’épouser, tu remportes le pactole. C’est comme ça que ça marche vieux. »
Lowell se mordit les lèvres, conscient que son petit jeu de force n’aurait pas pu vaincre celui de l’argent… Ou du moins, pas contre tout les joueurs réunis.
« Alors ? Tu mises quoi ? »
Les gars ricanaient déjà. Et oui … Là, ils jouaient la dame de coeur, le cœur d’Abel. Par respect pour la jeune femme, il se devait de donner une grosse, une très grosse somme. Or, tout le monde savait que les parents de Lowell n’étaient pas enchantés par ce mariage grotesque et honteux, et ce n’est sûrement pas eux qui prêteraient la clef du coffre familiale pour le parier aux jeux. Il ne pouvait donc pas parier. Où si il le faisait, il dévalorisait considérablement la jeune prostituée. Vous imaginez si il posait sur la table le vulgaire billet qu’il avait dans la poche à ce moment là ? Et on ne serait pas privé de faire savoir l’affaire à La Belle ! Et Lowell aurait perdu bien plus qu’un simple billet.
Néanmoins, il se retourna, s’avança vers la table, prit un papier, un stylo, griffonna quelque chose et signa Lowell Marvin d’un geste énergique. Puis il regarda les autres en poussant le papier sous leurs nez.
« Je ne peux vous donner que ça pour l’instant. Un certificat selon quoi j’ai bien joué à votre jeu. Si je perds il vous faudra attendre la mort de mon père. Mais tout est là, c’est signé de ma main et vous en êtes témoin … Je mise l’ensemble de mon héritage. »
Il resta encore un instant silencieux, observant la tête ahurit des hommes qui lisaient noir sur blanc et signé le papier qu’il leur avait donné, puis il se retourna une nouvelle fois et partie pour de bon.
Vertu ? Altruisme ? Noblesse ? Romantisme ? Non, ne prenez pas les actes de Lowell pour ce qu’ils semblent être : ils ne l’étaient pas. Non, Lowell était juste sûr de lui ; pour lui les dés étaient lancés et ne tarderait pas à s’arrêter de tourner sur eux même. C’était juste un jeu, lui qui les aimait tant. Un jeu excitant par l’ampleur qu’il prenait, mais rien d’autre qu’un jeu. Il avait misé sur le double 6 et celui-ci allait bientôt apparaître sur la table.
Je juste un peu de patience et de sang froid. Et …
Jackpot.
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MessageSujet: Re: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptyDim 22 Nov - 20:12

Cinquième partie : Il lui demanda sa main


Il ne restait que deux choses à accomplir. L’une, ne tarda pas à l’être :
C'était une semaine après la mise en jeu de son héritage.
Bien que le problème de la dot soit en partie résolu, Lowell continuait de se promener avec Abel dans les alentours de Wild’Oak city. En fait, la jeune femme n’était absolument pas au courant de ce qui s’était tramé pendant tout ce temps. Elle était consciente que Lowell se bagarrait souvent avec ses « rivaux » si détestables mais elle ignorait que celui-ci avait entamé toutes les procédures pour qu’un mariage sans encombre ait lieu le plus vite possible. Toutes ces informations qui lui échappaient ne faisait qu'accroître l’agonie dans laquelle elle se trouvait : elle pensait dur comme fer que son cher client ne voudrait jamais lui demander à nouveau sa main.
Et Lowell en était parfaitement conscient.
A vrai dire, il n’attendait qu’une seule chose, qu’un seul signal : qu’Abel dise de sa bouche qu’elle en avait marre, qu’elle ne supportait plus de retourner à la maison close, qu’elle préférait rester avec lui plutôt qu’être avec cent hommes… Qu’elle était tombé éperdument amoureuse de lui.
Et oui, Lowell était un vicieux personnage mes amis ! Il voulait tout ou rien. Et TOUT avait une signification bien complexe et précise pour lui.
Certains hommes considèrent qu’une fois que la femme succombe et laisse ses chaires à disposition, ils obtiennent tout, l’apothéose de ce qu’ils pourraient avoir, le summum de leur domination, la totale soumission du sexe faible.
Oh quelle belle et grossière erreur !
Une femme n’est en aucun cas soumise quand elle cède son lucre, son plaisir. Et au contraire messieurs ! C’est dans ces moments là qu’elle peut être la plus puissante ! Parce que vous, vous vous abandonnez aux joies de la délectation et en oubliez parfois beaucoup de choses. Pas une femme ! Si elle est maligne, elle peut vous tenir par les couilles et vous rabaisser quand bon lui semblera. Ne sous-estimez jamais la force d’une femme, même dans les moments où elle semble être plus faible.

Non, Lowell lui ce qu’il voulait c’était un véritable TOUT. Celui que l’on obtient quand l’autre surpasse sa honte, qui se livre cœur ouvert, offre de lui-même son âme et son être par le billet extraordinaire qu’est la parole sincère. Il savait que le corps viendrait après et n’était pas pressé de croquer la pomme.
Si Abel, par un jeu de séduction avait voulu passer outre le besoin de parler, elle se serait prit un refus catégorique de Lowell, ce qui, vous le pensez bien, aurait refroidit l’ambiance si chaleureuse qu’il y avait entre eux. Fort heureusement pour les deux amoureux, cette idée fut mise de côté (oui elle y avait pensée) et elle commençait à céder, à vouloir se livrer nue face au Marvin.
Ce fut donc ce jour, environ une semaine après le fameux passage du pari, après avoir longuement réfléchi, qu’elle prit sa décision : ce serait à leur prochaine rencontre ou jamais. Elle attendit avec anxiété leur balade habituelle et la veille, elle en fut même malade si bien qu’elle prit un jour de congé qu’elle passa à faire les cent pas dans sa chambre.
Jour J.
Durant toute leur promenade, son cœur lui battait la chamade. Elle était affolée, apeurée et le temps filait bien trop vite pour lui laisser le temps de se calmer. Vint le moment où ils commencèrent à se diriger vers le village, à s’en rapprocher de plus en plus et comme d’habitude, ils ralentirent le pas. Pas assez au goût d’Abel.
Il régnait entre eux un silence pesant qui voulait tout dire. Elle ne le supportait plus, c’était le moment, c’était l’instant, elle devait parler.
Elle s’arrêta. Elle sentait toutes ses sensations qu’elle avait en revenant à chaque fois amplifié par on ne sait quoi de concret.
Lowell s’arrêta aussi, regardant la ville. Il savait que c’était le moment qu’elle avait choisit pour s’abandonner à lui. Ce qu’il avait attendu de longs mois, ce pour quoi il avait combattu tout ce temps.
« Oui, vas-y Abel. Dis moi tout. Offres toi à moi, fais le premier pas ! Je sais que tu aurais voulu que ce soit moi, mais non… Je veux les entendre, ces mots, parce que tu n’en peux plus de les enfermer au fond de toi. Laisse ta fierté de côté et parle-moi ! Je n’attends que ça. Je n’attends que ça …» se disait-il en savourant l’instant de silence.
Il avait rêvé et planifié cet instant avec précision et… Et pourtant, la culpabilité le gagna. Il ne la regardait pas mais il savait qu’elle était sûrement au bord des larmes.
« Oui… Sûrement en train de pleurer. C’est pas facile de s’avouer vaincu… »
Non, pas facile en effet. Surtout quand on est aussi orgueilleuse qu’Abel. Briser cet orgueil, c’était donc là que Lowell voulait en venir ? Rabaisser Abel sous prétexte qu’elle serait à lui tout entière ? Ne l’était-elle pas déjà si elle était sur le point de parler ? Elle était sur le point de faire sacrifice de sa personne, pour Lowell, devant Lowell.
Ils restèrent un moment plantés là, combattant chacun leurs démons intérieurs. Abel essayait de trouver le courage pour parler, le plus clairement possible. Lowell, lui se demandait si ça valait vraiment la peine de la laisser parler.
Courage.
Abel, ouvrit la bouche :
« … J’en… J’en ai mar…
- Et si tu ne rentrais pas à la maison close ce soir ? » un moment de silence, des yeux ronds qui se lèvent, une Abel que Lowell étonnait toujours, un Lowell qui s’était étonné lui-même, pas d’aveux enflammés, juste une proposition très mal tournée. Il s’empressa de rectifier un peu le tir.
« Ce soir. Et tous les autres soirs bien entendu. Et même, si tu veux rentrer en pleine journée. Mais autre part que cette maison-là. Enfin, dans une autre maison.
Lowell avait comme l’impression de s’enfoncer d’avantage et regretta presque d’avoir prit la parole même si dans un sens, il fut soulagé d’abréger les souffrances de sa belle donzelle. Abel coupa court aux tentatives quelque peu foireuses d’explications de Lowell.
- J’ai plus envie d’y retourner.
- Ouais, bah j’ai pas envie que t’y retournes.
- Ok, on est d’accord.
- Je pense aussi. »
Et ce fut ainsi qu’Abel ne retourna plus à la maison close, changea d’adresse, rentra dans une autre maison : celle de Lowell.

Ah ! Je vous vois venir ! Vous pensez qu’une fois à la maison ce fut une libération de la libido extraordinairement violente et fougueuse ? Comme dans tous les films ou l’on voit deux personnes enlacées l’une contre l’autre dans une passion à vous couper le souffle, entrant à l’aveuglette parce qu’impossible de décoller leurs lèvres l’une de l’autre, dans une belle chambre préparée à l’occasion ? Bah non ! Vous avez tout faux mes couillons !
Lowell entraîna La Belle dans une sorte de cabanon un peu en retrait du village qui avait l’air abandonné et en sale état de l’extérieur. Ils y entrèrent : en fait, l’intérieur était aménagé comme une petite chambre coquette et agréablement chaleureuse. Il y avait même une petite cheminée improvisée que Lowell s’empressa d’allumer. Abel ne comprenait pas trop quel était cet endroit, mais se doutait bien que c’était ici qu’elle allait loger au lieu de revenir à la maison close. Elle s’assit sur le lit, observant l’intérieur de la pièce. La chaleur des flammes d’une cheminée fraîchement allumée semblait l’apaiser et elle somnolait déjà comme un chat fatigué. Elle aima tout de suite cet endroit, elle ne savait pas trop pourquoi.
Lowell s’assit enfin à côté d’elle, deux sandwiches qu’il venait de préparer dans une assiette. Il en prit un, l’invita à faire de même. Et tout en mangeant il expliqua.
« C’est mon repère à moi. C’est ici que je viens quand j’en ai marre de mes vieux. »
Abel sourit, amusée qu’un gringalet tel que Lowell ait son petit repère secret, comme les mômes. Elle hésita a trouver ça ridicule ou mignon à souhait, rajeunissant son amant d’une dizaine d’années.
Puis petit à petit son sourire s’effaça, elle continua de manger, sans rien dire. Elle pensait bien que Lowell n’allait pas l’emmener chez lui, ni la présenter à ses parents… C’était une prostituée après tout et bien malgré elle, Abel ne put s’empêcher d’être mélancolique. Ce qui ne passa pas inaperçu : Lowell remarqua son air maussade et se mit à rire aux éclats à la plus grande confusion d’Abel. Elle le regarda s’étouffer à moitié avec un air abasourdi, n’osant pas demander le pourquoi de ses rires inexpliqués. C’est alors qu’elle sentit sa main entourer sa taille l’entraînant en arrière. Elle se retrouva sans trop savoir comment allongée sur le lit, dans les bras d’un Lowell qui gloussait toujours d’un fou rire qu’il n’arrivait pas à taire. Elle s’en trouvait, à sa grande surprise très gênée, attendit sans oser bouger que le Marvin se calme et qu’il explique.
« Ce soir je peux pas te ramener là bas, chez mes vieux, parce que bon… Je ne les ai pas préparé à recevoir une dame en pleine soirée. Mais d’ici quelques jours, j’irai les avertir de ta venue. Pour l’instant, puisque tu n’as nulle part où aller, on reste ici, juste provisoirement.
- Une seconde… Tes parents vont accepter que MOI je débarque chez eux comme ça ?
- Bien sûr que oui ! Il n’y a plus de problème puisque je leurs ai promis la dot. Et puis de toute façon, ils ont pas vraiment le choix.
Abel déglutit, rougit légèrement.
- La dot ? Quelle dot ?
- La tienne.
- Je n’en ai jamais eu !
- Moi oui.
- Hein ?!
- Ecoute, c’est une longue histoire, mais tu vois, tout est réglé, opérationnel, tout marche sur des roulettes quoi. Il ne me manque qu’une chose : ton consentement.
- Mon consentement ? A quoi ?
- Rah ! ne fais pas l’ignorante Abel !
Abel sourit en se mordant les lèvres. Bien entendu qu’elle avait comprit.
- Non, je ne comprends pas. Tu me demandes ma main là ?
- Non, ton pied !
- Lowell !
- Bah quoi ?! J’en sais rien moi ! Qu’en penses tu ? Tu m’épouserais ?
- T’es pas mon genre !
- Hein ?!
- Mais … Je réfléchirai à ta proposition avec beaucoup d’intérêt.
Lowell s’arrêta de rire, respira lentement, reprenant son sérieux perdu depuis un moment.
- Réfléchis pas trop hein ?
Elle sourit. Elle avait une de ses sensations de chaleur qui vous prennent au cœur : soulagement et bonheur. Lowell l’avait demandé en mariage et il semblait être tout autant fébrile et impatient qu’elle l’était. Ça se comprenait non ? Après tout se temps à se tourner autour, sans rien dire, enchaînant déceptions sur frustrations.
Après un moment de silence, Abel se hissa et plaça sa tête dans le creux du cou de Lowell et ferma ses yeux, fatiguée.
- J’y ai réfléchi.
- Déjà ?
- Tu veux attendre plus longtemps ?
- Non… Et ?
- Tais toi et dors.

Et ainsi, sans vraiment l’avouer, les deux jeunes amants s’étaient déclarées leur amour. Ils s’endormirent paisiblement, l’un près de l’autre… Enfin.

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." Lowelletabel001copie


[Ils sont trop mignons >w< ça pu l’amour !]
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MessageSujet: Re: [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour."   [Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." EmptySam 28 Nov - 19:34

Sixième et dernière partie : Ils vécurent heureux

A partir de là, tout fut différent.
Abel ne retourna plus à la maison close, ne fut plus obligé de céder son corps au premier venu. Ni d’ailleurs à Lowell.
Eh non ! Lowell ne s’était pas rué sur celle qui allait devenir sa fiancée ! Mais alors, que faisaient Abel et Lowell dans ce petit cabanon pendant les quelques jours où ils y logeaient ensemble ?
Ils parlaient.
Et ils parlaient beaucoup. De tout. De choses banales, de petits détails, ils parlèrent des parents de Lowell, comment celui-ci les avait convaincus, de ce qui s’était vraiment passé dans le dos d’Abel. Puis on eut marre de parler du passer, on voulu passer à autre chose, envisager un avenir. On parla de la prochaine rencontre avec les futurs beaux parents, du déménagement d’Abel chez eux, puis du mariage en lui-même et enfin, de leur future maison.
Et là, on posait le doigt là où ça faisait mal. La maison.
Lowell était préoccupé par ce dernier point. Il était de coutume que la dot aide à l’achat d’une nouvelle maison. Or la dot en question servit à tout autre chose : c’était le second problème.

Avec cette idée farfelue de mariage, la maison close perdait l’une des plus rentable prostituée qu’ils possédaient et ils pouvaient bien poursuivre Abel pour la simple et bonne raison qu’elle leur appartenait ! Une seule solution : « acheter » La Belle.
Suite au consentement de sa demande en mariage, Lowell empocha la « dot » gagné aux jeux, et cela lui sembla évident que cet argent permettrait de libérer Abel. Et c’est ce qui se fit. Mais du coup, il n’y avait plus de dot, et le Marvin père n’était pas près de céder son héritage alors qu’une soit-disant dot aurait dû couvrir ce genre de frais. Lowell se retrouvait pris dans un étau. Il avait Abel, ils s’étaient fiancés, mais ne savait pas où ils logeraient pour débuter leur vie de jeunes mariés.
Ce fut Abel qui eut LA brillante et génialissime idée.
Piquée par enthousiasme d’une idée si soudaine, elle prit la main d’un Lowell perdu dans ses pensées alors qu’ils se promenaient (ils avaient gardé certaines habitudes qu’ils trouvaient charmantes et ô combien relaxantes) et l’emmena devant le petit repère secret de Lowell.
Entre temps, il faut vous préciser que cette petite cabane avait prit une grande importance aux yeux des deux fiancés : c’est là qu’ils avaient passé leurs première nuit ensemble, là que Lowell (re)demanda la main d’Abel (ou le pied…), là qu’ils revenaient bien souvent pour être seuls.
Bref, la petite cabane était inscrite dans le cœur de chacun d’eux et Lowell avait même décrétait de son habituel air platonique que son repère secret était devenu aussi celui de sa fiancée : vous pouvez vous imaginer que ce décret fort formel eut pour effet de faire rire la jeune femme qui connaissait de Lowell son côté enfantin… Mais s’en étonnait toujours.
Quoi qu’il en soit, Abel voyait alors le monde comme une évidence, comme si tout s’imbriquer petit à petit pour former leur vie.
Elle se retourna, regarda Lowell avec un de ses sourires fiers et pétillants de vie et déclara à vive voix :
« On ne peut pas acheter une de ses maisons super grande et belle qu’on voit partout parce qu’on est un peu fauchés à ce niveau là, mais tu sais, j’ai pas vraiment envie d’une maison sans vie, construite par d’autres gens qu’on ne connaîtra sûrement jamais. Moi je veux une maison à nous, et rien qu’à nous, qui a une histoire et un cœur qui bat. Fais là nous ici cette maison ! Construis-la toi-même ! »

Oui, c'était une idée merveilleuse. Et Lowell fut déchargé de ce poids qui lui pesait.
La maison fut donc construite, petit à petit : il avait laissé la cabane comme fondation, gardant ses murs, ses poutres… Il en fit la chambre conjugale et bâtit autour le reste des organes. Surélevant l’avant il fit une sorte de petite véranda protégée par un auvent, pour que la neige n'encombre pas l’entrée. Elle était tout en bois et ressemblait à un de ces chalets que l’on trouve si souvent à Wild’Oak. Bien modeste comme demeure… Surtout pour un Marvin ! Mais ça leur convenait largement. Ça leur ressemblait tellement.

[Rétro - 12 ans auparavant] "Celles qui font l'amour, par amour." LowellandAbelenceinte002

Il prit quelque temps pour la construire si bien que leur mariage fut repoussé (ils ne pouvaient pas commencer leur vie dans un endroit en pleine construction !) et comme Abel tenait absolument à ce qu’ils se marient au début du printemps, la deadline pour les travaux de la maison s’était allongé d’encore un an.

Ce retard ne fut pas perçu comme une regrettable déception pour la jeune femme mais justement, comme une sorte de chance, un sursis. Elle devait encore accomplir quelque chose, régler une affaire très importante : convaincre sa sœur de venir à un mariage que celle-ci refusait !
Abel avait beaucoup parlé de sa sœur jumelle à Lowell, et elle avait beaucoup écrit sur Lowell à sa sœur. Malgré cela, Eve Siner ne voulait pas venir voir le futur beau-frère qui allait lui enlever sa précieuse Abel, même si elle avait beau lui dire que d’une manière ou d’une autre, c’était déjà fait. Il lui fallut bien quelques mois pour la persuader de venir au moins juger par elle-même.
Elle vint.
Et à la grande déception d’Abel, le courant ne passa…pas du tout !
Quand il apprit la venue de sa sœur, on chambra beaucoup Lowell :
« Tu vas tomber amoureux de la sœur jumelle aussi ?!! » « Deux pour le prix d’une ?! T’as un sacret bol mon p’tit gars ! ».
Bien entendu, il se foutait éperdument de ce que pouvaient dire les autres, mais en y réfléchissant bien, à la base, Lowell était tombé amoureux d’Abel d’un simple regard ! Voir une 2ème Abel pouvait peut-être l’ébranler non ?
Ce ne fut absolument pas le cas.
Tout l’inverse même : du premier regard, il sentit un profond rejet, une aversion. Sentiments partagés par Eve.
Mais tout de même, c’était incroyable ! Il avait beau l’observer plus attentivement, essayant de retrouver dans son visage, dans ses attitudes ces petites choses qui l’avaient fait succomber à Abel… Rien.
Il la trouvait carrément différente par on ne sait quel miracle. Il en venait même à se demander si Abel ne s’était pas trompée, si Eve n’était pas vraiment sa sœur jumelle mais juste une sœur, et encore. Et pourtant, elles se ressemblaient comme deux gouttes d’eau ! Les autres gars du villages ne comprenaient pas comment Lowell ne se troublait pas. A part un style vestimentaire radicalement différent, pour le reste du monde, il était bien difficile de savoir qui était qui, si elles prenaient la même expression. Lowell, lui, les reconnaissait à tout instant.
Eve l’espiègle voulu le tester et essaya de tromper le fiancé avec la participation de sa sœur, comme certains jumeaux qui changent leurs vêtements pour faire la farce à leurs parents. Mais le tour fut déjoué : quand Lowell croisa dans les couloirs de sa maison une Abel en pantalon militaire en essayant de reproduire l’air de garçonne de sa sœur, il faillit mourir de rire.
« Putain !! Ça te va ABSOLUMENT pas Abel !! »
C’était instinctif. Lowell avait toujours eut beaucoup d’instinct.

Abel eut de longues discutions avec sa sœur, lui expliquant en détail et avec une émotion que parfois on ne peut retranscrire par écrit tout ce qui s’était passé entre eux. Depuis leur rencontre, à la manière dont Lowell s’y était prit, jusqu’à ce jour là. Son discours enflammé surprit Eve et elle fut attendrie de voir sa tendre Abel aussi enthousiaste à l’égard de ce qui lui était arrivé.
La dernière fois qu’Eve l’avait vue, Abel était encore perdue dans son délire de « liberté ». Elle se proclamait heureuse mais sa sœur sentait que ce n’était pas de ça qu’Abel avait besoin. Finalement, Eve conclut que Lowell lui avait apporté beaucoup. Elle n’allait pas jusqu’à dire qu’il lui avait fait découvrir le bonheur ! Non, trop d’orgueil pour laisser l’autre ours insomniaque avoir le dessus de cette manière ! Mais elle avoua à demi-mot qu’il l’avait mise sur le chemin d’une vie beaucoup plus simple et saine.
Et Eve donna sa bénédiction. C'était quelques mois avant le mariage, la maison subissait les dernières retouches et l’on préparait une grande fête pour un mariage que tout Wild’Oak city attendait avec impatience.

Ils se marièrent donc.
Le mariage fut des plus étranges d’ailleurs : Il y avait une sorte d’euphorie, d’allégresse, de joie partagée qui avait submergé les gens du village. Eve n’était pas habituée à ce milieu mais fut enchantée de voir tout ce beau monde si heureux de fêter un mariage si peu ordinaire. Par remord sans doute, elle intervint une fois : « Si quelqu’un s’oppose à ce mariage, qu’il parle ou se taise à jamais ! ». Lowell lui avait lancé un de ses regards assassins qui cloua tout de suite le bec d’une sœur qui s’était écrié « moi ! » par excès de jalousie.
Deux ans s’étaient écoulés depuis leur toute première rencontre. Deux ans pour un mariage qui se finit par une grande fête que tout Wild’Oak City garderait longtemps en mémoire.

On n’appelait plus Abel « La Belle » et on douta même qu’un jour elle eut été prostituée.
Elle avait changé. Ce n’était plus la gamine arrogante et fière que l’on connaissait sous ce nom oublié : elle était devenue la plus tendre et la plus douce des femmes du village et certains hommes jalousaient encore plus le malicieux Lowell qui avait réussit là où tant d’autres avaient échoué.
Et lui donc? Eh bien, il s’était bien assagi… Ou du moins, il avait bien réduit le nombre de ses escapades nocturnes de beuverie et de jeux de cartes (il est inutile de vous préciser qu’il n’allait plus non plus draguer les filles ou aller au bordel) mais il persistait néanmoins à sortir de temps à autres pour profiter de sa jeunesse. Et cela se faisait même souvent avec la compagnie d’Abel qui n’hésitait pas elle aussi à reprendre ses habitudes de femme fatale.

Plus le temps passait, plus leur amour mûrissait. Un équilibre entre douce tendresse et violente passion se mit en place dans une stabilité sereine.
Lowell du s’absenter six bons mois : la guerre frappait la Nouvelle-Thulé, séparant le sud et le nord : les Mages et les Technopolitains. Wild’Oak city n’était pas vraiment touché par les horreurs de cet affrontement absurde même si de temps à autres des hommes étaient appelés pour aller au front. Marvin eut de la chance d’avoir choisi un métier tel que chirurgien. Il ne fut pas appelé pour tuer des gens, mais pour aider les médecins en tant qu’aide soignant et (évidemment) chirurgien.
La chance voulut aussi qu’à Wild’Oak city on n'avait pas vraiment de médecin et qu’on avait besoin de lui au village. Il en revint un peu aigri, déplorant le vice des hommes.
Seuls les chaleureux bras d’Abel lui redonnèrent goût aux choses et lui firent prendre conscience à quel point elle lui était précieuse, à quel point cette femme lui apportait ce qu’il avait la sensation de n’avoir jamais eu auparavant. Abel lui était unique et la guerre, le sang, les horreurs lui enseignèrent qu’il fallait s’empresser de profiter de la vie… Une vie si fragile.
Ce fut à partir de cet épisode qu’un nouveau projet, beaucoup plus grand, beaucoup plus constructif vit le jour.
« Et si nous avions un enfant ? » avait-il laissé échappé en regardant la lisière de la forêt, à moitié endormi sous les tendres caresses de sa femme.

Deux ans et demi qu’ils se connaissaient, un an et demi qu’ils s’étaient mariés et une toute nouvelle route dans laquelle ils s’engageaient, le cœur remplit d’espoir et de rêves d’avenir et déjà un ventre ne cessait de grandir, toujours plus beau, toujours plus rond, balbutiements d'une nouvelle vie...


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