Elle détestait ça. Ce froid qui vous engourdissait tous les membres, vous tirait la peau et semblait vous inviter à un sommeil sans rêves quand il n’y avait plus d’énergie pour lutter.
Rester dans la rue lors des grands froids était suicidaire mais rester trop longtemps dans les centres d’accueil demeurait tout aussi dangereux, ou presque. L’administration policière n’avait que faire du temps qu’il faisait et les sans papiers ne passaient jamais entre les mailles du filet lors des contrôles intempestifs.
Vanéa avait des papiers, certes. Mais qui n’avait pas été renouvelé depuis plus de deux ans. Alors elle passait le moins de temps possible dans les centres, se persuadant que pour elle, ce n’était pas pareil ; dans son cas, la situation était différente à la leur. Cherchant à tout prix quelque chose pour se sentir moins misérable.
Le temps s’était adoucis et rester dehors était redevenu presque tolérable, avec les vêtements appropriés. Elle accumulait les couches au point de se sentir entravée dans ses mouvements. Mais il fallait bien ça.
Dans sa quête de chaleur, ses pas l’avaient conduite dans le quartier où se trouvait jadis le vieux théâtre, bâtiment un peu branlant qui fût le refuge de plusieurs troupes pendant des années. Aujourd’hui, les lieux étaient abandonnés et tombaient en ruines, l’établissement ayant fait faillite. Une feuille à moitié déchirée était placardée sur ce qui restait du volet de la porte. Un avis de construction. Ou de démolition. Un acte scellant à tout jamais le passé, en tout cas.
Elle avait pesté. Elle s’était maudite. Ça lui fendait le cœur, elle n’aurait jamais dû remonter la rue jusqu’ici. A présent, elle errait dans les rues de Halbitas, cherchant un endroit où se poser, l’esprit tourmenté par la rancœur et la nostalgie.
Elle fût arrachée à ses pensées par des éclats de voix. Des rires et des clameurs... d’enfants. A l’abri du vent, dans une petite cours intérieur, se déroulait un spectacle de marionnettes. Elle avait adoré ça, étant enfant ou comme marionnettiste pour la troupe. Les yeux s’illuminer, les cris désordonnés et des pleurs quand la situation leur échappait... Elle aurait aimé pouvoir se joindre à eux. Mais de là où elle était, elle pouvait profiter un peu du spectacle...
... Ce qui ne sembla pas échapper à l’homme qui tenait l’entrée sous le passage couvert. Il s’était levé et avancé de quelques pas dans la rue.
« Hé ! Toi ! Le spectacle te plait ? Tu crois vraiment pouvoir en profiter sans payer ?! »
Vanéa n’avait pas eu l’esprit assez vif pour se rendre compte de ce qui se passait et déjà l’homme lui avait empoigné le bras, tirant violemment.
« Tu crois quoi ? Qu’on fait ça par charité ? Allez ! Files-moi tes 5 Astrayas et j’te laisserai tranquille ! J’les connais, moi, les catins comme toi, toujours à radiner et à piquer le fric des autres ! Allez, file moi ton sac ! »
Elle se débattait tant bien que mal et personne ne serait venu l’aider...
Ce fût Surya, l’oiseau chimère, qui lui vint en aide, s’attaquant au visage de l’homme, griffant et becquetant. L’esprit de Vanéa se remettait peu à peu en place et, très vite, les actions de circonstances devinrent évidente. La jeune femme donna un ferme coup de pied dans l’entre-jambe de son agresseur, un éclair de colère se lisant dans son regard, puis cala fermement son sac sur son épaule pour prendre la fuite.
Elle courut plus loin et plus longtemps qu’elle ne l’aurait cru, portée par l’adrénaline. Toutefois, le malaise se fît bel et bien ressentir, mettant fin abruptement à sa course. Elle s’était à moitié effondrée contre un mur, pâle et tentant de reprendre son souffle.
Surya s’était posé près d’elle et émettait un sifflement plaintif.
[Illus à venir plus tard, un jour, peut-être... *sbaf*]