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 [7 ans auparavant] Little Less Conversation

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AuteurMessage
Ash O'Graham

Ash O'Graham


Messages : 725
Date d'inscription : 08/08/2010


Age du Personnage : 26 ans
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[7 ans auparavant] Little Less Conversation Empty
MessageSujet: [7 ans auparavant] Little Less Conversation   [7 ans auparavant] Little Less Conversation EmptyLun 7 Mai - 19:43

>début<

L’appart de Théo était clean, bien aménagé, idéalement situé en centre-ville… un peu étroit certes, mais suffisamment grand pour la quinzaine de personnes qui constituait la bande habituelle.

Bref, on s’était calés sur le canapé, certains avaient formé un cercle dans un coin de la cuisine (plutôt le coin abritant les bières), puis d’autres s’étaient bêtement assis sur des chaises autour de la table, où un certain nombre de bouteilles aux couleurs et aux parfums divers se vidaient déjà. Il faisait sombre. La lumière tamisée venait de petits spots discrets et de l’écran télé, incrusté dans le mur, qui diffusait des clips. En cherchant bien, on découvrait émergeant du plafond les enceintes qui diffusaient la musique, emplissant la pièce de rythmes pop-rock trafiqués à l’électro.

On parlait fort pour s’entendre, on discutait de choses et d’autres, pas très intéressantes. Élise me soulait. Elle s’était assise contre moi sur le canapé, et me collait sous prétexte de me parler. Mais elle avait rien à me dire. J’aurais jamais dû coucher avec elle la semaine dernière. Maintenant elle s’accrochait comme s’il se passait quelque chose… J’étais juste un peu bourré, Élise, tu m’a chauffé j’ai pas dit non, voilà, oublie. Mais non, elle parlait, elle parlait, elle parlait, et elle était d’autant plus chiante qu’elle essayait de me plaire.


J’ai fini par me lever au milieu d’une de ses phrases pour rejoindre le groupe qui parlait dans la cuisine. Théo était parmi eux, et il me tendit immédiatement une bière avec un sourire compatissant, sans oublier un regard amusé vers Élise qui était restée plantée sur le canap’. Théo, en voilà un avec qui on pouvait coucher sans qu’il devienne lourd : prends exemple, Élise, apprends !

Malheureusement, la conversation s’avéra à peu près aussi insipide dans la cuisine qu’au salon. On parlait de tel prof, de tel devoir – une vraie bande de collégiens. Théo relevait à peine le niveau avec quelques bons mots. Et puis j’avais l’esprit ailleurs, vers la soirée de Liekaterinev… ça tombait le même soir, évidemment. Sa bande de potes était un peu bizarre, un peu geek. Lui-même, surtout, était étrange. Mais justement, j’avais cette sensation qu’avec eux au moins, on ne ressasserait pas en permanence les mêmes conneries. Au moins, en parlant avec lui, j’avais eu l’impression de m’adresser à quelqu’un – et pas à une enveloppe superficielle et interchangeable.


Théo posa la main sur mon bras. J’étais en train d’enfiler ma veste.

« Tu te barres ?
- Ouais j’suis fatigué… Et puis Élise me pompe un peu là, j’ai juste envie de partir.
- Ok, pas de souci… »

Mais il avait l’air un peu déçu. La musique couvrit suffisamment mes paroles pour que lui seul m’entende.

« Viens chez moi demain soir ? »

Il eut à peine le temps d’acquiescer, j’étais déjà parti.

*

L’air du dehors était frais et doux. Il coulait sur ma peau et mon visage… J’aimais bien cette atmosphère nocturne de début d’automne, à peine humide après l’orage. Les pavés des rues étaient luisants de pluie et reflétaient la lumière diffuse des lampadaires. Le ciel s’était éclairci. À peine quelques nuages diaphanes passaient encore paresseusement devant la lune.

Il était minuit je pense, et bien vite je quittai la petite rue déserte où habitait Théo pour rejoindre l’avenue où passait le tram. Là, des groupes de jeunes marchaient en se poussant du coude, un duo de filles passa à vélo, l’une sur la selle et l’autre assise sur le guidon, riant.

Je montai dans le tram. Au fond du wagon, un trio de punks enjoués jouait de la guitare et du synthé, entourés de lycéens éméchés se laissaient aller à danser sur leurs mélodies vives. La rame glissa silencieusement à travers les boulevards. Je descendis aux Rafalants.

Le district s’appelait ainsi depuis l’époque de la construction de la Citadelle, parce qu’il s’était d’abord trouvé en bordure de la ville, soumis aux vents, aux ‘rafales’ du ciel ouvert, avant qu’on n’installe les boucliers. Maintenant, avec les extensions circulaires progressives de la Citadelle, il était d’autant plus à l’abri, entouré de nouveaux quartiers, loin des courants d’air de la bordure – mais il avait gardé le nom.


Je m’engageai dans une rue mal éclairée. Le néon d’une boîte de nuit clignotait, mais je passai devant sans y prêter attention. J’entendais déjà les rythmes heurtés de la musique industrielle et le tapage humain. Je tournai dans une impasse en direction du bruit. À gauche, une grande double porte en métal vibrait sous les notes lourdes. On m’ouvrit, les voix trafiquées et les sons dérapaient.

« Seth Liekaterinev m’a invité » dis-je simplement au type qui tenait la porte. Il haussa les épaules et il me fit rentrer. Visiblement il suffisait de ne pas être flic pour passer…


Je suis vite jeté entre les corps. Il y avait peut-être une centaine de personnes. L’ambiance hésitait entre la langueur des herbes et l’excitation des poudres. C’était un grand entrepôt aménagé sur deux niveaux. En bas, la foule dansait sous les lumières spasmodiques. Sur la mezzanine, je distinguais des silhouettes incertaines englouties dans l’ombre de canapés et de fauteuils. J’eus le sentiment que Seth était là-haut.

Je me traçai un chemin dans la masse tumultueuse, évitant les verres renversés, les amateurs de pogo. Je passai devant l’open-bar où on me refourgua une vodka-pomme sans que j’aie rien demandé. Enfin, je trouvai l’escalier, au fond, et grimpai rapidement les marches en grille de fer.

L’ambiance était plus calme au-dessus. Moins de monde, la musique comme étouffée par l’écho de la salle, l’espace tranché par les poutres en métal massif. Je repérai Seth, posé dans un fauteuil, une blonde calée contre lui. Ils étaient en cercle avec d’autres, autour d’une table basse encombrée de verres et de bouteilles qui semblaient bien meilleures que ce qu’on servait en bas. Seth avait l’air tranquille…


Voilà. Arrivé là, je n’étais même plus sûr de ce que j’étais venu chercher.

J’avalai ma vodka-pomme cul-sec, jetai le gobelet en polystyrène par-dessus la rambarde, et m’avançai vers lui. Une seconde plus tard, je m’asseyais dans le fauteuil qui fermait le cercle.
Seth tourna sans hâte son visage vers moi. Dans cette ambiance nébuleuse, trouée de lumières vives, ses yeux bleu glace me firent l’effet de ceux d’un chat.

« Tiens, O’Graham. T’es venu. »

Il avait dit ça sur le ton de la constatation, sans sympathie particulière mais sans agressivité non plus.

« Ouais… J’étais à une autre soirée mais c’était complètement mort. »

Il hocha simplement la tête, compréhensif, et se cala au fond de son canapé en esquissant un signe vers la table basse.

« Sers-toi hein. »

Je me versai un verre. La blonde à côté de lui lui tapa sur la cuisse.

« Eh Seth ! Tu me présentes le nouveau ? Il sort d’où ? »

Il haussa les épaules et dit en souriant :

« Il s’appelle Ash O’Graham, il sort de science-po. C’est un maso qui s’assume pas, mais je crois qu’il est presque drôle. »

Visiblement satisfaite de la réponse, la blonde me fit un grand sourire de bienvenue.

« Moi c’est Irina ! »

Moi je restais cloué. Nan mais sérieux, ‘il sort de science-po et c’est un maso qui s’assume pas’… mais d’où ? D’où il présente les gens comme ça ?! Le pire, c’est que je me sentis tout de suite à l’aise.


Irina, plus bavarde que Seth, me présenta aux autres personnes qui étaient là. Je reconnus deux des membres du groupe de l’autre jour, qu’on me présenta comme s’appelant Marc et Laurène. Je saluai tout le monde. L’ambiance était posée. La soirée s’annonçait bien.
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